Brian et Carrie, deux étudiants passionnés, préparent un ouvrage sur les pires crimes commis sur le sol américain. Lui en l’écrivant, elle en l’illustrant avec ses photographies. Pour les accompagner et partager les frais du voyage, ils acceptent de prendre avec eux Early Grace, un type louche qui vient de sortir de prison (ça, ils l’ignorent bien sûr) et sa petite amie, Adèle, une jeune femme aussi déboussolée qu’attachante…
Ayant débuté dans l’univers du vidéo clip, Dominic Sena fait ses premiers pas en tant que réalisateur de long métrage avec Kalifornia, un thriller ultra violent qui ne s’embarrasse d’aucune concession. Ce qui explique sûrement son échec et son passage sous les radars lors de sa sortie (discrète) en 1993. Surfant sur la vague répandue des serials Killers initiée par le triomphe du Silence des Agneaux, le script suit deux personnages en couple, fascinés par ces tueurs sanguinaires, se retrouvant en covoiturage avec un cinglé de première et vont vivre une série de traumatismes inoubliables. Ce road movie pesant n’assène pas tous ses coups trop vite, instillant un malaise diffus avant de dégainer une violence décomplexée sans la moindre note d’humour. Sena tente de montrer combien les pulsions meurtrières d’un psychopathe sont indéchiffrables et imprévisibles et que les étudier semble être une pure perte de temps. La mise en scène joue avec nos nerfs, d’ailleurs pendant plus d’une heure, l’intrigue se traine presque avant de plonger dans une frénésie d’hémoglobine assumée et annonçant un peu le Tueurs Nés qu’Oliver Stone livrera l’année suivante. Mais le défi le plus original et gonflé de Sena réside dans le choix d’un beau gosse à la gueule d’ange pour incarner le Mal absolu.
Ce beau gosse, c’est Brad Pitt, révélé deux ans avant par Thelma et Louise, et qui pour sortir de son image figée d’acteur au physique de mannequin, s’enlaidit, s’est laissé pousser la barbe, les cheveux crasseux, l’allure clairement négligée et sa prestation puissante parvient à effrayer par son authenticité. En revanche, la star de la série XFiles, David Duchovny, ne déploie pas autant de nuances et reste trop en surface. Enfin, et le film ne serait sûrement pas aussi intéressant sans elle, Juliette Lewis (alors petite amie de Pitt à la ville) offre une performance remarquable de jeune fille décalée, victime de son aveuglement et hélas de son amour pour le Démon. Kalifornia n’est pas exempt de défauts ou d’une certaine complaisance dans la sauvagerie: ceci étant dit, sa mise à l’écart relève d’une injustice qu’il ne faut pas hésiter à réparer.
ANNEE DE PRODUCTION 1993.