Dans l’Amérique du milieu des années 50, April et Frank Wheeler forment un couple à part, désireux de vivre une existence différente avec des objectifs élevés. En emménageant dans leur nouvelle maison avec leurs deux enfants, ils se sont jurés de ne pas se laisser happer par la torpeur ambiante, par un avenir tout tracé d’avance. Hélas, entre lui qui fait un travail sans intérêt et elle qui s’ennuie à mourir et ressasse ses vieux rêves, leur mariage commence à devenir problématique…
Le grand Sam Mendes, réalisateur de théatre et brillant auteur du chef d’oeuvre American Beauty en 2000, s’empare d’un roman poignant de Richard Yates « Une Fenêtre panoramique » pour donner vie à ce drame intimiste profond, sensible, et d’une fulgurante portée. A nouveau, il décrit un couple heureux au démarrage de leur histoire et qui finit par s’éloigner, ne plus se comprendre, ne plus être en phase dans leurs idéaux respectifs. April rêve d’une vie d’évasion, de sensations permanentes, désirant ne pas s’enfermer dans un quotidien étouffant comme une prison. Frank, plus terre à terre, se contente de ce qu’il a , n’écoute pas ses envies, nie ses capacités et au fond, subit son existence. Ces deux êtres que Mendes filme avec beaucoup de compassion, de tendresse et aussi de vérité ont beau s’aimer, ils deviennent la preuve que s’aimer ne suffit pas toujours pour réussir un mariage, pour accéder au bonheur. En cela, le film est implacable de dureté par son approche très réaliste et très frontal des problèmes de couple, et il dépeint à merveille le désenchantement engendré par un vide qu’ils ne peuvent ni combler, ni fuir au fond.
L’écriture du scénario est d’une vive intelligence, d’une immense profondeur et touche au coeur même de nos sentiments et de nos propres contradictions. Pour donner encore plus de poids à cette tragédie feutrée qui se déroule sous nos yeux, Sam Mendés a fait appel à un couple mythique, celui de Titanic, sorti 11 ans plus tôt, et c’est un peu comme si l’on retrouvait Jack et Rose installés ensemble dans une vie de couple en apparence épanouie et heureuse, mais dans laquelle le vernis craque petit à petit. Leonardo Di Caprio a pris de l’épaisseur depuis le triomphe de Cameron et se montre ici comme un acteur ingénieux, précis, intense. Kate Winslet tient un de ses plus beaux rôles, tendue, insatisfaite, dévorée d’ambitions, elle livre une performance formidable qui lui a valu le Golden Globe de la meilleure actrice. Cette autopsie cruelle de la société américaine la plus sclérosée qui soit nous émeut, nous emporte dans un tourbillon d’émotions. Le paroxysme final achève de nous persuader que l’on est dans un cinéma qui met la barre très haut.
ANNEE DE PRODUCTION 2009.
