A Budapest, Alfred Kralik et Klara Novak travaillent dans une boutique de maroquinerie de Monsieur Matuschek, un patron qu’ils admirent. Les deux employés ne s’entendent guère. Alfred correspond par petites annonces avec une femme qu’il n’a encore jamais vue. Il découvre bientôt par le fait du hasard que la mystérieuse inconnue n’est autre que Klara… Sans révéler à celle ci la vérité, il cherche à se rapprocher d’elle et de s’en faire aimer…
Qui mieux que Ernst Lubitsch a su allier l’humour, la drôlerie et la tendresse dans ces comédies finement écrites? On se souvient évidemment de Haute Pègre, Sérénade à Trois ou Ninotchka. Des perles comiques avec du fond, un sens aigu de l’humain et une grande affection pour ses personnages qu’il sert toujours superbement en répliques percutantes et pleines d’esprit. The Shop Around the Corner, tourné avant To Be or Not To Be (un autre de ses chefs d’oeuvres), a toutes les qualités requises pour mériter le titre de comédie romantique d’excellence! Un récit truffé de quiproquos aussi irrésistibles que drôles, une mise en scène aérienne et une maestria de Lubitsch pour emmener son scénario plus loin que prévu! Au lieu d’être seulement burlesque, le ton n’oublie jamais d’être attendrissant, la sensibilité évitant l’eau de rose, et la sincérité dominant chaque situation. Derrière l’imbroglio sentimental qui se joue, le réalisateur décrit avec justesse le monde d’une petite boutique du centre de Budapest, les relations de ses employés entre eux, leur rivalité autant que leur complicité, et ce avec une constante vérité. Quand certains courent après l’amour, d’autres tentent d’échapper à leur solitude, capables de tout pour ne pas passer une soirée de Noêl seul et désemparé. Cette mélancolie est aussi bouleversante que les malentendus entre les deux protagonistes.
Un fort joli couple formé par James Stewart et Margaret Sullavan. Lui pas encore l’américain gendre idéal que Capra utilisera à si bon escient et qu’Hitchcock complexifiera dans ses policiers troubles, mais plutôt le Stewart assez jeunot et sorti d’Indiscrétions de Cukor. Elle ravissante et au charme contagieux qui se spécialisera dans ce genre romantique tout au long de son parcours. Cette adaptation d’une nouvelle hongroise, La Parfumerie, semble malicieuse et « évidente » dans sa construction: c’est là le propre du génie de Lubitsch: faire croire que tout est facile, alors qu’il a dû polir ce petit bijou avec une belle humanité. En mettant la barre très haut de son savoir faire.
ANNEE DE PRODUCTION 1940.