Los Angeles, début des années 50. Un tueur d’enfants vient de faire une nouvelle petite victime. La police multiplie alors les rafles dans les bas fonds, arrêtant des suspects potentiels. Gênée par toute cette agitation , la pègre locale décide de retrouver elle même le criminel, avant qu’il ne sévisse à nouveau…
Après un de ses films les plus controversés Le Garçon aux cheveux verts, Joseph Losey commença à avoir des difficultés avec la commission des activités anti américaines, accusé de sympathies communistes. Il entreprit donc de réaliser un remake du chef d’oeuvre inégalé de Fritz Lang M. Le Maudit, sûrement un peu pour signifier combien la traque d’un homme acculé pouvait générer angoisse et tension. Reprenant fidèlement la trame de l’original, cette version ne se contente pas d’être une pâle copie, puisque Losey réalise un authentique film noir, en vogue à l’époque, avec son ambiance pesante, ses mines patibulaires (les hommes au service de la pègre ont des gueules adéquates), et surtout il utilise les décors naturels des rues de Los Angeles comme un personnage à part entière. L’action a cette fois plutôt lieu en plein jour et en plein soleil, à contrario du film de Lang, ne le rendant pas moins prenant ni doté d’un bon suspense. La poursuite du meurtrier dans la ville, puis dans le bâtiment dans lequel il se retrouve retranché comporte des séquences haletantes, dignes des polars les plus réussis des années 50. Depuis 1931 que le film allemand est sorti, la grammaire cinématographique a évidemment évolué et Losey a compris que moderniser le propos était un des défis essentiels de cette relecture.
Ainsi, il fait de ce tueur d’enfant pathétique un être perturbé mentalement par un passé sûrement traumatisant et le décrit davantage comme un malade, produit d’une société matriarcale et matérialiste. En revanche, il n’hésite pas à pointer la police comme incompétente et incapable d’arrêter les agissements du criminel, donnant une « légitimité » aux actions musclées et radicales d’une pègre très puissante à cette époque. Enfin, M se distingue également par l’interprétation habitée de David Wayne, un acteur d’habitude habitué aux seconds rôles, et reprenant avec force la partition mythique de Peter Lorre. Moins inquiétant (en apparence) que son prédécesseur, il apporte à ce remake qu’il ne faut pas négliger une densité particulière.
ANNEE DE PRODUCTION 1951.