En 2012, Maureen Kearney, déléguée CFDT chez Areva, devenue lanceuse d’alerte pour dénoncer un secret d’Etat, s’est battue bec et ongles contre les ministres et les industriels pour faire éclater ce scandale et défendre les intérêts de milliers de salariés menacés. Jusqu’au jour où après avoir été menacé à plusieurs reprises, elle est agressée chez elle par de mystérieux individus et voit sa vie basculer…
Deux ans après La Daronne, comédie policière plutôt réussie malgré des facilités, Jean Paul Salomé revient avec un thriller politique captivant relatant l’affaire Maureen Kearney. Cette histoire vraie, troublante, bien au delà de son caractère didactique sur les magouilles d’EDF avec les chinois afin d’ouvrir des centrales nucléaires et de provoquer des plans sociaux massifs, se concentre surtout sur l’agression de cette syndicaliste, seule contre tous, et sur la manière dont elle est passée de statut de victime à celui d’accusée. Bien que le récit ne sorte pas d’une linéarité sûrement nécessaire pour ne pas amplifier la complexité du dossier, Salomé maintient un bon suspense, rendant ténue la frontière entre réalités, faits avérés et mensonges, au point que les doutes subsistent jusqu’au bout. Comme le rappelle le film, même des années après, la vérité n’a pas été mise à jour, soit par la faute de l’Etat (qui a sûrement intérêt à faire durer les choses) soit par la justice dont les carences sont criantes. On peut d’ailleurs reprocher à Salomé d’avoir écourté les séquences de procès et de les avoir ainsi rendu un peu « cliché » et expéditives. Le film a par ailleurs le mérite de remettre en lumière cette affaire délibérément un peu oubliée ou mise sous le tapis.
Sans oublier la dimension intime de cette femme battante et opaque, Salomé privilégie bien sûr l’aspect thriller, car il sait que les zones d’ombres vont questionner les spectateurs et interroger sur la toute puissance de ces industriels impitoyables avec le sort des salariés, à des seules fins financières. Le réalisateur retrouve aussi son actrice de La Daronne, Isabelle Huppert, dans un rôle rappelant un peu les contours de celui qu’elle tenait dans Elle, avec toutefois moins d’ambiguité. Admirable comme toujours, elle est la pièce maitresse d’un casting par ailleurs tout à fait excellent (Marina Fois, Yvan Attal, Gregory Gadebois, Pierre Deladonchamps, etc…). Un film très recommandable.
ANNEE DE PRODUCTION 2023.
