Madeleine, brillante et idéaliste jeune femme issue d’un milieu modeste, prépare l’oral de l’ENA dans la maison de vacances d’Antoine, son petit ami, en Corse. Une après midi, sur une route déserte, le couple se trouve impliqué dans une altercation avec un riverain qui vire au drame. Lorsqu’ils intègrent chacun des postes d’importance au niveau du pouvoir politique, le secret qui les lie menace de ressortir au grand jour. Tous les coups sont permis…
Entre film politique, drame intime sur la culpabilité et thriller sournois, De Grandes Espérances ratisse large dans son récit et l’ambition de mener à bien son intrigue est une des qualités tout à fait louables du réalisateur Sylvain Desclous, jusque là auteur de longs métrages assez confidentiels. En voulant traiter autant de thèmes à la fois et de jongler avec différents genres, il ne trouve pas toujours le bon équilibre et frôle par moments le recours à des ellipses maladroites. Il n’empêche qu’il parvient aussi dans le même mouvement à maintenir un suspense astucieux, décrivant le déraillement progressif d’une ligne droite vers quelque chose de plus sinueux. Le film dépeint aussi bien les ambitions politiques, le discours social sur les méthodes brutales imposées aux salariés dans les entreprises, que le parcours intérieur d’une jeune femme dont la droiture peut forcer l’admiration ou effrayer selon le point de vue que l’on choisit. En toile de fond, la lutte des classes n’est jamais loin dans la narration, le combat à mener coûte que coûte pour sortir de sa condition et même au prix de la morale! Desclous combine aussi l’aspect policier presque remisé au second plan et avec une tenue correcte, il garde notre attention en éveil. Jusqu’à une conclusion aussi audacieuse que crédible.
Bon film d’acteurs aussi puisque dans le rôle central, Rebecca Marder (quatrième fois à l’écran en à peine une année) confirme tout le bien que l’on pense d’elle dans cette partition ambigüe et troublante, qu’elle joue avec intelligence. Dans un second rôle de députée pugnace, Emmanuelle Bercot se distingue à nouveau avec le potentiel énorme qu’elle impose. Un peu plus attendu, Benjamin Lavernhe campe le petit ami lâche avec assurance malgré tout. Prenant et plutôt réussi, ce long métrage nourrit de grandes espérances et atteint son objectif.
ANNEE DE PRODUCTION 2023