Madrid, années 50. Paco, un jeune provincial qui vient d’achever son service militaire, cherche du travail afin d’assurer un avenir au couple qu’il compte former avec sa fiancée, Trini. Celle ci est bonne et garde toutes ses économies pour en profiter après leur mariage. Paco loue une chambre chez Luisa, une veuve séduisante avec laquelle il découvre la passion physique. Partagé entre les deux femmes, Paco perd pied. Il apprend entre temps que Luisa vit aussi d’escroqueries diverses avec des truands locaux…
Un peu avant Almodovar et du temps de Bunuel, il y eut un cinéaste espagnol important qui n’avait pas droit aux mêmes faveurs de la part de la critique, en France tout du moins, et qui tourna pas mal de films peu ou mal sortis dans l’Hexagone: Vicente Aranda. Son actrice fétiche, Victoria Abril, démarra sa carrière grâce à lui dans un superbe film ressorti l’an dernier et tourné en 1976: Cambio de Sexo. Ils tournèrent ensuite plusieurs fois ensemble jusqu’à se retrouver sur ses Amants. Inspiré d’un fait divers authentique survenu dans l’Espagne des années 50, Aranda relate un triangle amoureux entre un ex jeune militaire promis à une jolie demoiselle folle de lui et encore vierge, travaillant comme bonne, et une autre femme, plus libre financièrement (son veuvage et ses combines lui permettent de mener un bon train de vie) et surtout sexuellement débridée. Amants est l’histoire d’une passion physique qui va tout ravager sur son passage. Aranda ne s’attaque pas frontalement à la dictature de Franco alors en cours, toutefois il dénonce à sa manière une société machiste, puritaine, conservatrice, vivotant à l’ombre de l’Armée et de l’Eglise. Au programme de ce drame sombre: frustrations, infidélité, appât du gain, sexualité explosive…
A chaque plan, on sent poindre la montée d’une tragédie inéluctable, et on est embarqués dans le dilemme du jeune héros, Paco, littéralement divisé entre la sainteté de sa jolie promise et les desseins de sa satanique maitresse. Il est interprété par Jorge Sanz, un acteur espagnol très peu connu chez nous, au physique de beau ténébreux. Quant à sa partenaire, il s’agit donc de Victoria Abril, brûlante de sensualité, intense dans son jeu au point qu’elle décrocha l’Ours d’Argent au Festival de Berlin en 1991. Cette oeuvre, âpre et très belle, obtint le Goya du Meilleur Film et Aranda celui de réalisateur. Des raisons supplémentaires pour se questionner sur la quasi invisibilité du métrage depuis.
ANNEE DE PRODUCTION 1991.