Au coeur de l’été, Caroline, mère de famille d’une quarantaine d’années, débarque dans un petit village du Sud de la France où elle doit organiser en urgence les obsèques de sa mère, une avocate volage, qu’elle ne voyait plus guère. Elle est accueillie par Pattie, une femme du coin, qui aime raconter à qui veut l’écouter ses aventures coquines avec des hommes de toute sorte. Alors que le bal du 15 Août approche et que l’enterrement est imminent, le corps de la défunte disparait mystérieusement…
L’univers des Frères Larrieu, que l’on a découvert avec le très joli Peindre ou faire l’amour, étonne toujours aussi agréablement ici avec cette comédie hédoniste au récit incongru (le corps d’une morte se fait la malle!!), fantasque, célébrant la vie, et mettant le langage en valeur avec des dialogues piquants, quand ils ne sont pas désopilants. Sous un soleil de plomb, dans une campagne apaisante des Pyrénées, les personnages débattent sur leurs fantasmes, leurs préférences sexuelles, leur rapport à l’autre et cette ode à tous les plaisirs (des plus refoulés aux plus extravertis) impose son style pétillant dans une mise en scène audacieuse, pensée, élaborée avec un soin précieux. Cette histoire aux confins du réel, ne tombant pourtant jamais dans le pur fantastique, fait juste de la place pour tous: les vivants bien vivants et les morts toujours un peu là, même une fois partis. La nature joue un rôle évidemment crucial dans les humeurs et les ressentis des protagonistes, rendant le film solaire et vivifiant. Seul le rythme de la seconde partie pêche un peu, passant de séquences entrainantes à d’autres plus bavardes.
Avec son texte cru et frontal, 21 nuits avec Pattie ne cherche nullement à choquer gratuitement ni à se vautrer dans la vulgarité, plutôt d’afficher un grand besoin de se décomplexer face à nos besoins somme toute naturels. C’est un régal pour les deux grandes actrices en charge de restituer les mots des cinéastes, et on peut applaudir bien fort Karin Viard, épatante lorsqu’elle raconte avec une assurance inouïe ses expériences sexuelles avec moults détails, tandis que la plus discrète Isabelle Carré l’écoute en retrouvant ses sensations enfouies. Leur duo est un pur émerveillement de spectateur. Pour leur faire face, André Dussollier en écrivain copié collé de Le Clézio trouve aussi un de ses rôles les plus surprenants depuis longtemps. Véritable hymne à la liberté et à la gourmandise des sens, cette comédie n’oublie pas un instant d’être intelligente. Ce qui ne gâche rien!
ANNEE DE PRODUCTION 2015.