L.B Jeffries, photographe réputé, est immobilisé chez lui, la jambe dans le plâtre, après un accident sur un reportage photo. Pour tuer le temps, il se met à observer ses voisins de l’immeuble d’en face depuis sa fenêtre et commence à connaitre un peu les habitudes des uns et des autres. Un particulièrement attise sa curiosité, Lars Thornwald, fait des allers et retours curieux en pleine nuit avec une valise et sa femme ne semble plus dans l’appartement. Jeffries est convaincu que son voisin a supprimé son épouse et en fait part à Lisa Fremont, sa très belle petite amie, qui partage bientôt ses doutes…
Oeuvre d’une grande modernité, Fenêtre sur Cour compte parmi les réussites incontestables de la filmographie d’Alfred Hitchcock. D’abord par son scénario futé digne d’un excellent roman policier, foisonnant d’idées et nourri par deux thèmes que le maitre du suspense affectionnait par dessus tout: l’obsession et le voyeurisme. Portés ici à leur incandescence, ses sujets sont élaborés dans un récit à énigmes, où le héros obnubilé par une idée fixe, cherche à démontrer la culpabilité d’un homme qu’il soupçonne du meurtre de sa femme… simplement en l’ayant espionné par sa fenêtre! Ensuite, par une mise en scène virtuose où Hitch offre la prouesse technique de rester dans un décor unique (un appartement sur cour) et de créer une ambiance confinée, d’autant plus angoissante pour le spectateur, comme pris au piège dans un bocal, à l’instar de la jambe plâtrée du personnage principal. L’auteur de Psychose parvient à faire exister toute une galerie de protagonistes en filmant leur quotidien et sans pour autant les faire parler, et nous fait participer à l’envie de s’immiscer dans leur vie, la curiosité est un vilain défaut et malgré cela, on se laisse prendre au jeu! D’une rigueur exemplaire, Fenêtre sur Cour dispense à la fois un fond de polar (un crime a t’il été commis?) et nous divertit dans le même temps avec les bouts d’histoires d’amour que l’on devine dans ces appartements habités soit par un couple de jeunes mariés, par une vieille alcoolique, par une jolie gymnaste exhibitionniste, par un pianiste esseulé, etc…
Ironiquement, Jeffries ne voit pas les sentiments qu’il nourrit pour sa petite amie adorable, trop accaparé par l’attention excessive qu’il porte à ceux d’en face et alimentant ses fantasmes voyeuristes. Qui sont sûrement aussi ceux d’Hitchcock lui même! L’accord parfait entre James Stewart (dirigé pour la deuxième fois par le maitre après La Corde) et la divine Grace Kelly (également un second round pour l’actrice après Le Crime était presque parfait) ajoute la touche glamour idéale sur laquelle Hitch ne transigeait pas pour servir sur un plateau d’argent un couple romantique très bien imaginé. Total des opérations: un des cinq meilleurs films de Sir Alfred, et rien de moins qu’une magistrale leçon de cinéma qui n’en finit pas d’être commentée, 70 ans après sa sortie!
ANNEE DE PRODUCTION 1954.