En Novembre 1975, débute le deuxième procès de Pierre Goldman, militant d’extrême gauche, condamné en première instance à la réclusion criminelle à perpétuité pour quatre braquages à main armée, dont un ayant entrainé la mort de deux pharmaciennes. Il clame son innocence dans cette dernière affaire et devient l’icône de la gauche intellectuelle. George Kiejman, jeune avocat, assure sa défense…
Depuis quelques années, les « films de procès » reviennent à la mode dans la production française, notamment avec les excellents La fille au bracelet, Saint Omer ou très récemment la Palme d’Or Anatomie d’une chute. Cédric Kahn, réalisateur aussi discret que solide, a choisi pour son douzième long métrage de reconstituer avec exactitude le procès historique de Pierre Goldman, la tenue des débats, les actes d’accusation, les plaidoiries, ect… Dans ce huis clos étouffant et captivant de bout en bout, la parole occupe une place évidemment prépondérante, et le film soulève des problématiques toujours d’actualité (le racisme, les dérives policières, l’engagement et le militantisme politique), rendant le propos hyper moderne, alors que l’on est bel et bien dans un « film d’époque ». Kahn ne délaisse jamais l’aspect purement judiciaire, montre la théâtralité constante des interrogatoires, la façon dont chacun livre sa vérité, et au final, demeure toujours le doute tenace, car tous les témoignages restent subjectifs. Les face à face sont prodigieux de précision, de tension, exploitent au maximum les éléments dramatiques de cette affaire aux contours obscures. Car en fin de compte, si l’on est certain que Goldman était un marginal, militant et braqueur à ses heures, il a toujours prôné la non violence et clamer sa non responsabilité dans les deux meurtres l’ayant mené en Cour d’Assises.
Cédric Kahn est au plus près de ses acteurs, les dirigeant avec un soin particulier, surtout Arieh Worthalter, campant un Goldman plus vrai que nature, à l’éloquence incroyable et fascinant par ses raisonnements nourris. Le Président est incarné par Stéphan Guérin Tillié, un comédien plutôt bon qui s’était fait rare ces dernières années, tandis que Arthur Harari, scénariste et parfois acteur, joue l’avocat Kiejman, entretenant avec son client des relations plus que chaotiques. Cette immersion totale dans ce procès hors normes donne le vertige par sa maitrise et son intelligence d’élaboration. Une oeuvre se posant clairement comme un rempart contre les outrages du temps et qui lutte pour garder la mémoire vive sur ce personnage controversé. A ne pas manquer!
ANNEE DE PRODUCTION 2023.