Isabelle et Gérard, couple d’acteurs désormais séparés, ont été marqués par le suicide récent de leur fils unique, Michael. Il leur a laissé une lettre a chacun et les a « conviés » à se rendre à la Vallée de la Mort, suivre un périple où il leur « promet » qu’ils vont le revoir brièvement….
Avec cette intrigue métaphysique fragile, Valley Of Love est autant un film que l’on ressent qu’une réflexion sur le deuil, la perte et la culpabilité. Guillaume Nicloux organise les retrouvailles de deux monstres sacrés, Gérard Depardieu et Isabelle Huppert, 36 ans après le Loulou de Pialat. Il les place dans les décors naturels magnifiques de la Vallée de la Mort et capte leurs fêlures, leur humanité, donnant presque l’impression d’improviser leur texte (pourtant très écrit). Le propos ne se veut pas spirituel, même s’il semble faire appel à notre croyance ou non en un au delà possible. Justement l’immensité du décor engloutit le tandem, se transformant en Vallée de l’Amour : celui de cet ancien couple, celui qu’ils éprouvent dans leur chair pour ce fils disparu qu’ils ont « raté » de son vivant. Dans cette ambiance dominée par une chaleur suffocante, ils tentent de croire qu’une rédemption se profile pour eux, que ce lieu va être le sanctuaire de leurs questionnements obsédants. Le récit de ce voyage nous apparaît en premier lieu minimaliste, et puis quelque chose d’indicible finit par nous happer, créant une connexion à des émotions discrètes, hors de toute logique. Nicloux frise le fantastique et l’étrange, sans pour autant avoir recours à des effets spéciaux, tout est suggéré et les fantômes qui parcourent le film n’en sont que plus perturbants.
Bien sûr, la structure générale de l’édifice tient avant tout sur la présence de ces deux méga stars, délivrant des prestations monumentales sans avoir l’air d’en faire des caisses, juste en étant « eux mêmes »: Huppert dans un contrôle de jeu qu’on lui connait si bien, Depardieu massif, écorché, dans un rôle « à nu » rappelant l’abandon qu’il avait sur Mammuth. En les regardant attentivement, on mesure leur importance capitale dans le paysage du cinéma français et Nicloux joue évidemment de leur passé riche en films majeurs. Valley of Love existe d’abord par et pour eux, en dehors même du cadre imposé par la mise en scène. Sans mysticisme idiot, c’est autant sur notre rapport à la mort qu’à la vie que cet objet « non identifiable » nous invite à réfléchir.
ANNEE DE PRODUCTION 2015.
