Julia, la quarantaine, est une femme instable et surtout alcoolique, une tempête rousse malmenée par la vie. Le jour où une de ses voisines lui demande de kidnapper son propre fils retenu par son grand père très riche, Julia y entrevoit une porte de sortie. S’ensuit une échappée sauvage qui la mènera bien au delà de tout ce qu’elle avait imaginé…
Il aura fallu dix ans de maturation et de préparation au réalisateur Erick Zonca pour renaitre de ses cendres, après la gloire obtenue avec son opus La Vie Rêvée des Anges, multi primé et considéré comme une oeuvre culte. Grand fan du cinéma de John Cassavetes, Zonca a écrit un scénario ressemblant sur bien des plans à Gloria, le polar que Cassavetes réalisa au début des années 80, partant sur un canevas de thriller punchy situé entre Los Angeles et le désert mexicain. Julia est pourtant d’abord et avant tout un portrait féminin captivant et évolutif: au départ, elle est présentée comme une anti héroïne, antipathique et autocentrée, uniquement motivée par l’argent, au fur et à mesure de la narration, elle développe des liens d’affection inattendus avec ce gamin qu’elle a enlevé, comme s’il lui donnait une nouvelle raison de vivre, en tout cas une ouverture vers des lendemains meilleurs. Zonca mène son film à 100/h grâce à une mise en scène nerveuse, énergique, et à l’image de son personnage titre, dans le mouvement permanent. Plein de vitalité, le récit s’oriente vers des zones plus sombres dans son ultime demie heure, où tout s’emballe et où les rebondissements tiennent habilement en haleine. Sous la forme d’un road movie, le film se fait de plus en plus violent, usant d’ailleurs de quelques séquences relativement invraisemblables sur lesquelles il faut être « indulgent ».
Le métrage tout entier repose énormément sur son actrice principale, l’incroyable Tilda Swinton, incarnant cette femme déchue, volcanique et prête à tout pour garder la tête haute et froide en toutes circonstances. Une très belle performance injustement boudée par l’ensemble des critiques, jugeant que Zonca l’a laissé partir en « roue libre ». Il la filme cependant avec un tel amour et une fascination si marquée qu’elle emmène cette histoire à suspense vers des contrées inédites. Les polars réalisés par des français sur le sol américain sont très rarement des réussites: ce Julia en est un brillant contre exemple et vaut le voyage en bagnole. D’autant plus que cette folle virée n’exclut pas des éclats de tendresse.
ANNEE DE PRODUCTION 2008