Emma aime Sammy qui aime Cyril qui l’aime aussi. Ce qui aurait pu être un marivaudage amoureux à la fin du siècle dernier va être dynamité par l’arrivée du SIDA. Alors qu’ils s’attendaient au pire, la destinée de chaque personnage va prendre un virage inattendu.
Non seulement Gaël Morel ne fait plus parler de lui en tant qu’acteur, mais il se fait également rare dans le domaine de la réalisation. Son dernier opus remonte à 2017, Prendre le large qu’illuminait une superbe Sandrine Bonnaire. Son retour est donc d’autant plus bienvenu qu’il renoue avec son cinéma sensible, nous contant un triangle amoureux menacé par le SIDA encore meurtrier des années 90. Juste avant l’apparition des trithérapies enfin porteuses d’espoir. Une fille, deux garçons s’aiment, se croisent sans se déchirer mais sont bientôt tous les trois touchés par le virus. Morel fait preuve d’une bien jolie fluidité dans son récit, nous fait ressentir l’insouciance sentimentale avant le chaos et le drame à venir. Peut être une utilisation systématique de musiques signifiantes, accentuant inutilement le « pathos », fait partie des petits défauts à reprocher à cette oeuvre néanmoins simple et bien construite. L’ex héros fétiche de Téchiné célèbre autant l’amour hétéro, homo ou bi, ouvre son cœur avec un lyrisme touchant, qu’il avait déjà introduit dans son beau mélodrame Après lui . Le romantisme auquel on assiste ici est émouvant, car il ne paraît jamais artificiel.
Le trio de jeunes comédiens ajoute une valeur précieuse: Théo Christine, révélé par Suprêmes (le biopic sur la naissance du groupe de rap NTM), Lou Lampros vue dans Médecin de Nuit et De Son Vivant, et surtout Victor Belmondo, petit fils de, à la présence certaine , jouant ce photographe gay séropositif avec conviction. Au détour de quelques séquences, on retrouve Sophie Guillemin, Elie Medeiros, Amanda Lear et même Stéphane Rideau, ancien partenaire de Morel dans Les Roseaux Sauvages. Avec ce septième long métrage très plaisant , Gael Morel réaffirme son attachement au cinéma de Téchiné, dont on sent l’indiscutable influence.
ANNEE DE PRODUCTION 2024
