Dans la famille de Justine, tout le monde est végétarien. A 16 ans, elle est une adolescente surdouée et intègre une prestigieuse école vétérinaire dans laquelle elle retrouve sa soeur ainée. Cependant, à peine installée, le bizutage commence pour les arrivants. On « force » Justine à manger de la viande crue. Elle fait d’abord une sorte d’allergie, avant de développer une fascination pour la chair…
Qui pourrait continuer à prétendre que le cinéma de genre n’existe pas chez nous ou en tout cas n’est jamais à la hauteur des attentes? Ce tout premier long métrage vient contredire ce cliché stupide de manière éclatante. Furieusement original, Grave se déguste (si l’on peu dire) par son scénario subversif n’allant jamais dans la direction escomptée, surprenant d’une séquence à l’autre, s’autorisant toutes les audaces. Ce film d’horreur évoque le cannibalisme, à quelques encablures du Trouble Every Day de Claire Denis, dans un milieu peu vu au cinéma (une fac vétérinaire) et des personnages troubles. Prenant son temps pour installer le malaise qui gagne ensuite la seconde partie, Grave s’avère d’autant plus dérangeant qu’il est réaliste et que tout ce qui arrive reste de l’ordre du crédible. Cet Ovni a causé une déflagration en section parallèle à Cannes et marque ainsi la naissance d’une jeune réalisatrice inconnue à suivre: Julia Ducournau. Outre le récit perturbant, il faut souligner la mise en scène, ultra maitrisée, sans esbrouffe, tout au service de ce conte sombre. En dépit d’une volonté de second degré et d’accoucher d’une oeuvre « mutante », Ducournau ose aussi le gore, avec quelques passages particulièrement sanglants. En filigrane, elle traite également du passage à l’âge adulte dans ce qui pourrait s’apparenter à un récit d’apprentissage radicalement nouveau.
Au générique, une jeune débutante nommée Garance Marillier, au visage à la fois opaque et un peu inquiétant, et Ella Rumpf venue de Suisse dont le côté « vampire » apporte beaucoup au rôle de la soeur ainée. Pour les seconder, une petite mention spéciale à l’acteur algérien Rabah Nait Oufella, non seulement fort mignon mais très crédible en compagnon de chambrée gay, ainsi que Laurent Lucas, toujours spécialisé dans les univers étranges et que l’on avait déjà vu dans un film proche par son thème, le fascinant Dans Ma Peau de Marina de Van. Julia Ducournau a confirmé son grand talent avec son opus suivant , Titane, en décrochant (carrément) la Palme d’Or! Un coup de poing dans l’estomac!
ANNEE DE PRODUCTION 2017.
