A Marseille, Michel Poicard, un jeune voyou, vole une voiture et tue le motard qui le poursuivait. A Paris, il retrouve Patricia, une jeune américaine vendeuse du New York Herald Tribune, et qui a déjà couché plusieurs fois avec lui. Il lui propose de le suivre en Italie.
Tout ou presque a été dit, commenté, disséqué, critiqué, autour d‘A Bout de Souffle. Manifeste fondateur du mouvement de la Nouvelle Vague au même titre que Les 400 Coups de Truffaut, le film se présente pourtant sous le signe d’un scénario des plus minimalistes, une intrigue policière banale tenant sur une feuille de cigarette (un délinquant de bas étage est recherché par les flics pour en avoir tué un!). Sa réputation d’oeuvre culte s’explique par bien d’autres aspects. A commencer par une liberté de ton inédite, une iconoclaste façon de « faire des images » (avec le chef opérateur Raoul Coutard), une esthétique nouvelle comprenant des travellings, du mouvement incessant, une caméra à l’épaule pour mieux saisir l’instant immédiat. Tout cela dans des « décors » naturels: ceux des rues de Paris, du port de Marseille, pour s’éloigner le plus possible des studios, du factice, affichant un « je m’en foutisme » insolent quant au récit (éclaté et désordonné). L’auteur de cet « ovni » à part s’appelle Jean Luc Godard, ancien critique aux Cahiers du Cinéma, signant là son premier long métrage, réinventant la grammaire cinématographique et rentrant d’office au firmament des réalisateurs aussi bien incompris qu’adulés. A Bout de Souffle est le film de cet anarchiste cinéphile, adorant les polars noirs américains et qui leur rend une sorte d’hommage avec du jazz en fond sonore, un gangster en anti héros, des policiers en chasse et une jolie pépée blonde qui s’avère aussi salutaire que fatale. Au niveau du son, pas de prise directe, Godard recourant à la postsynchronisation, renforçant des dialogues quasi improvisés et en tout cas qui ne cherchent jamais à « faire écrit ». En bousculant tous les codes du cinéma traditionnel, Godard impose une radicalité étonnante que personne n’avait vu venir!
Confiant le rôle principal à un quasi inconnu qu’il révèle superbement à lui même et du nom désormais inoubliable de Jean Paul Belmondo, le cinéaste suisse le filme comme une sorte de Bogart frenchie, la décontraction en plus, se passant le doigt sur les lèvres ou affichant des moues et des expressions faciales de petit truand jouant fièrement au « jeune con ». Et puis, évidemment, il embauche une actrice américaine qu’il a admiré chez Preminger (Sainte Jeanne et surtout Bonjour Tristesse), la cinégénique Jean Seberg au minois si exquis. L’histoire d’amour qu’ils vivent contient autant de jeu que de fraicheur, de trahison que de déraison. Avec autant d’éléments pas franchement dégueulasses ayant façonné la légende, A Bout de Souffle reste une date charnière du 7e Art. Mais, au fait, « qu’est ce que c’est dégueulasse?? »
ANNEE DE PRODUCTION 1960.