BARRACUDA

M. Clément, un septuagénaire solitaire, vit dans un grand appartement avec pour seule compagnie, une poupée gradeur nature qu’il prend pour sa femme. Il invite un soir à diner son nouveau voisin, le jeune Luc. Avant le dessert, il l’assomme, le séquestre, voulant s’en faire contre son gré, un possible ami…

D’abord compositeur de musiques de films, Philippe Haïm est un nouveau venu dans la réalisation, lorsqu’il écrit et tourne ce petit opus étonnant, situé entre le thriller psychotique et le suspense retors. Barracuda se présente comme un huis clos (un grand appartement sombre), aux pièces lugubres et habité par un type pour le moins dérangé. Un vieux monsieur rongé de solitude, fan de Fred Astaire et passablement psychopathe. Haïm fait preuve d’une mise en scène carrée, laissant les rebondissements s’enchainer avec pas mal de tenue, et cette histoire de séquestration, assez atypique dans le cinéma français, tient la route en distillant son poison inquiétant et angoissant. La maladie mentale du personnage lui fait perdre toute notion de Bien ou de Mal, et on savoure ainsi son sadisme, en priant pour sa pauvre victime.

Ce conte cruel sur la solitude et la folie ne serait qu’à moitié abouti, sans l’interprétation de Jean Rochefort, stupéfiant dans un registre inédit pour lui, son flegme raffiné ajoutant une touche d’humour glacial à sa composition. Son jeune partenaire, Guillaume Canet, joue là son premier rôle au cinéma et n’est pas toujours très bon, disons que ce sont des débuts mitigés. Ca n’enlève rien à la tension éprouvée à la vision de son calvaire, du moins jusque dans l’ultime demie heure, un peu répétitive et un rien monotone. De bonnes idées de réalisation et un côté bien déjanté rendent tout de même ce Barracuda grandement estimable. Les films de ce genre ne sont pas si fréquents en France.

ANNEE DE PRODUCTION 1997.