1988, dans l’Angleterre de Margaret Thatcher. Jean, professeure d’éducation physique, est obligée de cacher son homosexualité, à fortiori depuis le vote d’une loi stigmatisant la communauté gay, interdisant de faire passer ce mode de vie pour « positif » ou normal. C’est sans compter sur une nouvelle étudiante, Lois, lesbienne elle aussi et menaçant de révéler son secret…
Il y a 35 ans à peine, une époque donc pas très lointaine de nous finalement, aimer une personne du même sexe que soi ne relevait pas de l’évidence, était encore très mal vu, et tout l’intérêt de ce premier film britannique est de maintenir une mémoire vive sur cet état de fait. Georgia Oakley, jeune cinéaste derrière la caméra, fait donc une oeuvre engagée et rappelle que l’homosexualité était un problème dans une Angleterre conservatrice, où les valeurs de la famille traditionnelle prenaient le pas sur tout type de comportement « déviant ». Elle met en scène une jeune héroïne, fraichement divorcée, en couple avec une autre jeune fille et sa difficulté à assumer sa différence au grand jour, notamment aux yeux de sa hiérarchie professionnelle. Etant prof, elle a la pression constante de devoir « donner l’exemple », ne pas faire de vagues, rentrer dans un moule tout tracé par les autres et les institutions. Délicatement, le scénario nous la montre prise dans une position inextricable, devant mentir, contourner la réalité, subir les allusions et les rumeurs, sans broncher. Blue Jean est l’histoire d’un acte de réparation, d’une rebellion silencieuse. Il est juste dommage que la mise en scène reste d’une timidité et d’une discrétion cadrant mal avec l’envie de hurler sa vérité de l’héroïne. Georgia Oakley revendique en sourdine ce besoin d’émancipation, sans trompettes ni klaxons.
Elle compte énormément sur son actrice principale pour capter le regard et l’attention du spectateur: Rosy McEwen, avec ses faux airs de Jean Seberg androgyne, sauve par son interprétation un ensemble honorable, mais inabouti. Son visage exprimant en même temps la résignation, la colère enfouie, la douloureuse incapacité à être elle même! Ce qui est frappant aussi c’est qu’au delà de la reconstitution des années 80 (coiffures, musique pop et disco, costumes), Blue Jean semble être un film d’un autre âge. Pour ses débuts de réalisatrice, Georgia Oakley n’a pas à rougir et offre une occasion de remettre en lumière des femmes libres de choisir leur sexualité.
ANNEE DE PRODUCTION 2023.