Eisenhower est Président des Etats Unis, le rock n roll est roi, et Wade Walter dit « Cry Baby » est le Bad Boy le plus populaire de la Fac. La timide et un peu coincée Allison va tomber raide dingue du jeune rebelle…
Le papa du mauvais goût assumé, ayant immortalisé la crotte de chien, les travelos dingos, les pépés à gros seins, les marginaux en tous genres, les loubards rigolos et fait du trash son cheval de bataille, M. John Waters en personne, a commencé à s’assagir un peu avec ses films de la fin de la décennie 80, notamment Hairspray, une petite bande musicale acidulée et inoffensive qui dénonçait (gentiment) le racisme endémique d’une grosse partie de l’Amérique. Deux ans plus tard, il remet la gomme pour rendre un vibrant hommage aux années 50 et surtout à la naissance du rock n’roll, immortalisé par Elvis Presley, accusé en son temps de « dépravation pour la jeunesse ». Waters s’amuse donc à imaginer deux bandes rivales, Les Rebelles d’un côté et Les Coincés de l’autre, habillés aux antipodes (frocs moulants en cuir et maquillages outranciers contre tenues uniformes et sans personnalité), se déclarer une guerre en chansons pour sortir chacun du lot! Cette fantaisie rétro à l’humour un peu laborieux, bourrée de références (projection de L’Etrange créature du Lac Noir dans une salle de ciné 3D, séquence finale totalement pompée sur La Fureur de Vivre, etc…) ne se prend évidemment jamais au sérieux et déroule une série de séquences chantées et dansées qui raviront les nostalgiques de cette époque bel et bien révolue. L’histoire d’amour entre le jeune héros gominé et craquant sur qui toutes les minettes bavent et l’héroïne blonde choucroutée « bonne fille de famille » rappelle aussi bien sûr les différences culturelles et sociales déjà présentes dans Roméo et Juliette.
Et Waters a eu l’ingénieuse idée de composer un casting aussi fou qu’improbable, prenant en premier rôle Johnny Depp, seulement connu jusque là pour la série 21 Jump Street, et qui révèle sa photogénie évidente, face à une ancienne vedette du porno Tracy Lords et une star installée de la pop music Iggy Pop!! Un mélange détonant idéalement mis en valeur par les outrances d’une mise en scène « sans prise de tête » alignant des chorégraphies incendiaires, des courses de bagnoles, des flirts langoureux et des blagues potaches plutôt rafraichissantes. Cry Baby n’a pas révolutionné la comédie musicale, il en est un de ses cousins déchainés qu’il faut prendre au troisième degré. Et aimer le rock semble une condition indispensable pour y trouver son compte.
ANNEE DE PRODUCTION 1990.