Georges Lajoie, un cafetier parisien, passe ses vacances comme chaque été dans un camping du Midi de la France, à proximité d’un chantier où travaillent des immigrés. Il retrouve sa bande d’amis, deux couples de Français moyens, dont l’un est venu avec leur fille la jolie Brigitte, récemment majeure et que Lajoie reluque avec insistance. Une après midi, il la viole et la tue et dissimule le corps juste près du chantier, dans l’espoir de faire accuser les arabes à sa place…
Coutumier d’un « cinéma plaidoyer » visant à dénoncer des scandales d’Etat (L’attentat), des meurtres de magistrats (Le Juge Fayard) ou les méthodes ultraviolentes de la police (Un condé), le réalisateur Yves Boisset ne fait pas dans la mesure pour mettre à jour des thèmes qu’il juge nécessaire de traiter. Avec Dupont Lajoie, il réalise une très virulente charge antiraciste et fait le portrait sans concessions et sans pincettes d’une frange de Français médiocres, xénophobes, limités intellectuellement et ce pamphlet anti beauf prend toute sa valeur à travers le personnage principal, un restaurateur sournois et haineux, coupable d’un acte atroce et qui, par lâcheté, préfère faire accuser et même pousser au crime un travailleur immigré innocent. Outre ce sinistre protagoniste, les autres gravitant autour de lui ne valent pas mieux, soit parce qu’ils cautionnent sa mentalité soit parce qu’ils vont jusqu’à participer à une ratonade, fruit d’une vague de haine inouïe. Boisset assume le côté caricatural de ces franchouillards veules, son film n’en perd pas sa force pour autant et a marqué les esprits par la férocité des dialogues et sa violence permanente (tant dans les mots que dans les images). Quant en plus, l’enquête de police se voit étouffée en haut lieu, l’écoeurement est total devant un système de pensée bien difficile à confondre.
Ce drame rude sur le Mal galopant qu’est le racisme ordinaire (et la bêtise crasse qui l’accompagne) serait moins sidérant sans le concours d’un casting de haute volée, emmené par des seconds rôles solides (Jean Bouise en commissaire impuissant, Victor Lanoux en campeur ignoble, Ginette Garcin en épouse complaisante, Jean Pierre Marielle en ersatz de Léon Zitrone et une Isabelle Huppert à ses débuts en victime virginale). Mais surtout par la composition de Jean Carmet, si employé dans la comédie, et s’avérant ici odieux et détestable au possible, démontrant l’étendue de son registre dramatique. A l’heure où les relents populistes font dangereusement leur retour, Dupont Lajoie reste d’une actualité brûlante et nécessite une revoyure pour la génération à venir.
ANNEE DE PRODUCTION 1975.