Geraldine ne peut pas avoir d’enfant. Avec son mari Pierre, ils essayent donc d’adopter un enfant cambodgien. Ils partent sur place et commence pour eux un long périple compliqué, où ils vont croiser d’autres couples dans le même cas, allant d’orphelinats en orphelinats, parfois découragés…
Toujours précis dans ses combats et ses récits de lutte diverses, quelles soient sociales, politiques ou autre, Bertrand Tavernier a planché pendant de longs mois pour mettre en gestation ce film racontant les arcanes très complexes d’une adoption d’enfant. Il place son récit au Cambodge, où ses personnages viennent chercher leur futur bébé, après de longues périodes d’enquêtes administratives, et avant de poursuivre leur combat avec les autorités locales, pour leur permettre de devenir enfin parents officiels. Avec une générosité de chaque instant, Tavernier propose une fiction proche du documentaire, décrivant les étapes ardues une par une, le temps très long nécessaire pour obtenir les agréments, les signatures, les visas, la tentation d’en passer par des cases illégales avec au bout peut être la déception d’un refus. Il saisit très justement les humeurs et les émotions changeantes de ce couple, jusque dans leur intimité, viscéralement acharné. L’énergie de la réalisation se ressent dans le mouvement incessants des protagonistes, toujours en déplacement, tendant les mains vers leur but ultime. L’autre force du métrage réside dans la capacité de Tavernier à filmer un pays traumatisé par son passé, meurtri par le génocide khmer rouge, un peuple en souffrance et qui pourtant « sourit toujours », comme le souligne une des répliques. Il ne fait pas l’impasse non plus sur les odieux trafics, la corruption, les dirigeants de certains orphelinats prêts à tout pour de l’argent, au détriment du sort des enfants.
Ce voyage fort en émotions et offrant également des moments de gaieté ou de complicité, notamment entre les couples de classe différentes mais partageant les mêmes galères, accuse par contre des longueurs inutiles dans la dernière partie. On sent que l’auteur de L627 a eu du mal à rendre son montage vraiment fluide, sûrement par désir de tout dire, avec un penchant appuyé pour le « didactisme », que certains trouveront sûrement un peu lourd. Il n’empêche que Holy Lola atteint largement son but: nous bouleverser par la bataille menée par le couple criant de vérité, formé par deux comédiens investis: Jacques Gamblin et surtout Isabelle Carré, sensible et tellement solaire.
ANNEE DE PRODUCTION 2004.