Hiver 1968. La légendaire chanteuse et actrice Judy Garland débarque à Londres pour des tours de chant à guichets fermés. Elle est pourtant au bout de rouleau, criblée de dettes, épuisée de trente ans d’excès et peine à retrouver son entrain d’autrefois. Sa déchéance ne va faire qu’en empirant les mois suivants…
Les biopics sont de plus en plus répandus et traitent souvent d’une infime partie de la vie d’une personnalité, afin de cerner au mieux son trait de caractère, son parcours, ou le bilan d’une existence. C’est le cas ici avec ce drame musical retraçant les derniers mois de Judy Garland, une des légendes les plus fortes d’Hollywood, devenue star très jeune et doté d’une voix absolument extraordinaire. Le parti pris de Rupert Goold (un réalisateur de téléfilms faiblards) n’est déja pas en soi une riche idée: pourquoi en effet ne se concentrer que sur le déclin et la triste fin de cette artiste incomparable, quel est l’intêret sinon de faire pleurer dans les chaumières, sans rendre une seconde un véritable hommage digne de ce nom à Judy? Ensuite son récit est bien souvent d’un ennui abyssal, ponctué ça et là de séquences chantées assez pauvres, et où l’on cherche vainement l’émotion. Les quelques flash backs tentant d’expliquer l’enfance de cette femme complexe sont chiadés en deux coups de cuillère à pots, et sombrent dans le ridicule. Même l’irruption d’un couple gay censé montrer l’attachement inconditionnel de son public n’apporte que perplexité et stupeur.
D’un point de vue narratif, le naufrage est quasi total, le montage se perd (et nous avec) dans un magma insipide et confus, et on se demande si l’apitoiement stérile distillé par une mise en scène roublarde va pouvoir être racheté par l’interprétation. Grave erreur là encore! L’actrice choisie est Renée Zellweger, la charmante et gaffeuse Bridget Jones, que l’on aime bien d’habitude et qui a même su donner de la voix dans Chicago , s’avère incapable d’incarner une icône pareille, trop grande pour elle dans tous les sens du terme. Elle essaie donc maladroitement de lui ressembler, aidée par un maquillage outrancier et vilain, et en chantant elle même les fameux standards dont le bijou « Over the Rainbow ». Sa voix n’est pas mauvaise, elle pourrait par moments séduire, mais le problème c’est que pas un instant elle ne parvient à frôler l’excellence de Garland. Tout simplement parce qu’elle n’est pas le personnage et que la passion qui devrait l’animer est introuvable. L’Oscar qu’elle a reçu pour le rôle demeure un insondable mystère. Le vrai et beau film sur la destinée de Judy Garland reste à faire. Et ce navet ne mérite que les oubliettes…
ANNEE DE PRODUCTION 2019.
Je suis tout à fait d’accord avec cette crique. J’ajouterai qu’il y a un nombre important d’inexactitudes historiques dans le film, mais pire encore est l’utilisation de la voix pitoyable de Zellweger au lieu de celle de Garland. La raison pour cette aberration est simple : le « Judy Garland Heirs Trust » , autrement dit la famille et les consultants de la famille que je ne nommerai pas, ne voulaient pas que la fin de la vie de Garland soit le sujet d’un film. Donc, la production n’a jamais pu toucher aux enregistrements de Garland. Ce film m’a laissé totalement froid, et dans aucun cas traduit le génie de Judy Garland. Un vrai film sur Garland est encore à faire… Mais les Fellini et les Visconti, qui auraient pu réaliser un film sur elle, ne sont plus parmi nous. En attendant, je conseille l’excellent livre de Christopher Finch, Rainbow: The Stormy Life of Judy Garland, qui nous montre la vrai Judy Garland avec toutes ses difficultés et son immense talent.