En 1926, pendant la guerre civile chinoise, le mécanicien en chef Jake Holman est muté sur le San Pablo, une canonnière qui navigue sur le fleuve Yang Tsé. Les machinistes, en majorité chinois, voient d’un mauvais oeil cet étranger américain désireux de reprendre les commandes. La révolution fait rage en même temps dans le pays et les marins doivent essuyer des attaques de plus en plus féroces…
Porté par les triomphes de West Side Story et La Mélodie du Bonheur, le réalisateur américain Robert Wise aborde cette fois un genre qu’il n’avait pas encore tenté et tout à fait en adéquation avec son ambition démesurée: le film historique. Cette longue fresque aux allures de superproduction, centrée sur la guerre civile chinoise autrement appelée la Révolution Rouge, traite notamment du choc des cultures entre occident et chinois et sa visée anticolonialiste parait évidente. D’ailleurs à sa sortie, Wise fut accusé d’avoir subtilement adressé une charge contre la guerre au VietNam à son pays, alors largement en faveur du conflit. Le récit se passe du point de vue d’un jeune marin qui va être pris dans les tourments de l’Histoire et comme Hollywood sait bien le faire, la dimension épique rejoint l’intime pour éviter de ne parler que de guerre, incluant même une love story paraissant un peu artificielle. Wise connait son métier, sa caméra fait preuve d’une belle fluidité et les mouvements de grue apportent la grandeur nécessaire aux images. Ce qu’il manque à cette Canonnière pour susciter une véritable passion, c’est un lyrisme à la David Lean, qui aurait pu éviter les longueurs ressenties, surtout dans la seconde partie. Ceci étant dit, la narration pointe du doigt des personnages intéressants: un militaire borné, un missionnaire non violent et un brave matelot dépassé par les événements. Chacun aura finalement la même destinée.
Cette saga un peu trop sage se laisse pourtant suivre avec un plaisir certain puisque c’est Steve Mc Queen, en héros romantique que la fatalité voue à la solitude, qui porte l’ensemble avec conviction, l’acteur étant à l’époque au sommet de sa popularité. Pour le seconder, deux comédiens solides partagent l’aventure: Richard Crenna et Richard Attenborough, et la seule femme dans ce monde d’hommes revient à la délicate Candice Bergen. La Canonnière du Yang Tsé parvient à montrer que toutes les tentatives de colonisation échouent et le final, désenchanté et cruel, rend ce film plus émouvant que ne le laissait supposer sa mise en place.
ANNEE DE PRODIUCTION 1966.