Dans une petite ville du nord de l’Italie, Giovanni, psychanalyste, mène une vie paisible, entouré de sa femme Paola, et de ses deux enfants adolescents, Irène et Andrea, le cadet. Un dimanche matin, Giovanni est appelé en urgence par l’un de ses patients et renonce à aller courir le jogging rituel avec son fils. Ce dernier décide donc d’aller faire de la plongée sous marine avec des amis. Un terrible accident survient, il ne reviendra pas…
L’un des plus singuliers cinéastes italiens, Nanni Moretti, nous avait habitués à des métrages doux amer, amusants et au fond politique toujours réjouissants. Jusqu’à ce virage à 180 degrés vers le drame poignant entrepris avec ce film. Décrivant une famille unie et heureuse frappée de plein fouet par la pire tragédie qui soit (la mort d’un enfant), Moretti divise son récit en trois parties distinctes. Dans la première, il filme le bonheur simple, le quotidien, le héros au travail (le défilé des patients dans son cabinet de psy est très bien croqué), la vie qui s’écoule doucement… Puis une seconde partie consacrée à la sidération et au malheur causée par le décès aussi soudain qu’horrible du fils. Enfin, une troisième dans laquelle le deuil voit poindre un peu de lumière. Ce thème douloureux et ô combien sombre est ici traité avec un tact infini, une pudeur de chaque instant par le réalisateur de Journal Intime. Evitant totalement le larmoyant facile qu’aurait pu faire craindre pareil postulat, il subjugue au contraire par sa capacité à distiller l’émotion par petites touches, de manière magistrale.
Bon nombre de séquences sont ainsi d’une implacable efficacité, ne cherchant pas à faire pleurer gratuitement, seulement avec un mot, un geste, ou une allusion et nous voila cueillis par le ton déchirant de ce scénario magnifique. En termes de jeu, Moretti s’est gardé le rôle principal et le tient avec une belle force intérieure, lui que l’on sent pourtant sans cesse sur le point de s’effondrer. Il a pour partenaire la sublime Laura Morante, bouleversante en mère brisée. La Chambre du Fils possède aussi une qualité rare: ne pas s’enfermer dans les ténèbres, mais au contraire avancer vers une fin plus apaisée, en douceur, rendant cette réflexion sur le deuil d’autant plus touchante. Un grand et beau film, justement récompensé par une Palme d’Or et qui reste le chef d’oeuvre de son auteur, à ce jour.
ANNEE DE PRODUCTION 2001.