Brillant avocat parisien, Victor se réveille un jour pour apprendre successivement deux mauvaises nouvelles: sa femme le quitte et son patron le licencie! Il y a des jours comme ça! Totalement bouleversé, il cherche réconfort et écoute auprès de ses amis et famille. Manque de pot: personne n’est apte à l’entendre, tous bien trop occupés avec leurs propres emmerdes…
Avec sa filmographie en dents de scie, la réalisatrice Coline Serreau a connu les sommets (Trois Hommes et un Couffin ou Chaos), s’est vautré aussi dans les navets oubliables avec La Belle Verte ou 18 ans après. Et avec La Crise, elle a cumulé succès public et critique grâce à une habile radiographie des maux du quotidien rencontrés par un pauvre avocat largué par sa femme et viré de son job. Sur un rythme endiablé, le film va à une allure de dingue, sûrement pour signifier à quel point tout va trop vite et de travers dans notre société moderne. Car Coline Serreau a beau avoir réalisé ce film en 1992, il trouve encore des résonnances d’une modernité incroyable. Son scénario fait la part belle aux dialogues (devrait on dire à la logorrhée des personnages entourant Victor et incapables de lui accorder une petite minute d’attention), composé de saynètes drôlissimes où la réalisatrice règle ses comptes avec le couple, le mariage, l’adultère, l’écologie, les chômeurs et le racisme. Beaucoup de thèmes traités un peu en vrac et à la va vite (mais c’est l’idée de base) et aboutissant à une comédie grinçante et divertissante à la fois. Satire sociale décapante, La Crise perd toutefois un peu son cap dans l’ultime demie heure, en se fendant d’un discours moralisateur sur les amitiés contrariées ou sur le socle sacré des liens du mariage. D’ailleurs, la conclusion s’en trouve affadie et vire au conventionnel.
Coline Serreau a misé sur les acteurs pour rendre justice à ses réparties cinglantes et autour de Vincent Lindon (un peu paumé et lunaire), il faut saluer les prestations de Zabou (désopilante), Maria Pacôme en maman prise par le démon de midi, ou Michèle Laroque et son abattage habituel qui laisse ici sans voix. En revanche, le personnage joué par Patrick Timsit (le parasite qui s’incruste pour trouver de quoi bouffer et en quête d’un bon copain) finit par agacer avec ses tics de langage répétitifs et sa voix nasillarde. Dans ce script récompensé d’un César, chacun a droit à son monologue et vide son sac, un peu comme s’ils s’époumonaient dans le vent. Malgré un petit côté démago, La Crise se range parmi les bonnes comédies populaires à conseiller.
ANNEE DE PRODUCTION 1992.