Irina, fragile et douce jeune femme, rencontre Oliver Reed, lors d’une de ses nombreuses visites au zoo de sa ville. Ils se plaisent et se marient rapidement. Pourtant, Irina semble souffrir d’un mal étrange, une partie d’elle même ne se sentant pas totalement humaine. Est elle descendante d’une race de femmes panthères? Oliver lui conseille d’aller voir un psychiatre pour régler son « problème » identitaire…
Exilé aux Etats Unis pendant la seconde guerre mondiale, le français Jacques Tourneur y tourna bon nombre de films fort intéressants. Sous l’impulsion du producteur Val Lewton, porté sur le genre fantastique, Tourneur est aux commandes de cette Féline, appelé à être un film très singulier. En suggérant à peu près tout et en ne montrant quasiment rien, le cinéaste réinvente la notion de terreur, accentuant son récit par un climat angoissant, voire oppressant. Le noir et blanc, composé d’admirables clairs obscurs, renforce encore davantage ce cauchemar aussi vaporeux que vaguement onirique dans lequel nous sommes plongés. Jouant sur le hors champ et l’invisible, Tourneur acquiert une modernité étonnante pour un petit film fantastique, au budget dérisoire et presque sans effets spéciaux. Tout en retenue et en mystère, le personnage d’Irina possède une belle complexité: tout à la fois frêle, vulnérable, mais aussi inquiétante lorsque sa part sombre surgit. Sans avoir besoin de faire de la surenchère, le réalisateur français condense l’intrigue en à peine 1H15 et obtient un résultat ultra réussi, au delà des espérances du studio RKO.
Ce style dépouillé de tout sensationnel fut la marque de fabrique de Tourneur, rempilant ensuite avec l’Homme Léopard et Vaudou, toutefois moins sophistiqués. L’autre atout numéro un du métrage se nomme Simone Simon, petite actrice de chez nous, superbe dans La Bête Humaine avec Gabin, et tenant là son passeport pour la gloire. Le rôle de cette femme panthère lui sied comme un gant, avec son visage de chat délicat. Elle aura bien du mal à se dépêtrer de cet emploi, définitivement culte pour les cinéphiles du monde entier. Cette fois ci, la bête humaine c’était elle et sa féline aura beau connaitre un remake plus gore quarante ans après, il n’égalera pas le moins du monde l’original.
ANNEE DE PRODUCTION 1942.