Cecilia mène une existence terne avec un métier de serveuse qu’elle déteste et un mari Monk qui ne la rend pas heureuse par ses infidélités et son manque d’amour. Pour s’évader, elle passe son temps libre au cinéma, son seul refuge, où elle va revoir souvent les mêmes films comme son préféré La Rose Pourpre du Caire. Un beau jour, le héros du film, Tom Baxter, un aventurier, sort de l’écran et vient à sa rencontre…
Bien souvent, on a réduit le style de Woody Allen à un empilement de ses névroses multiples et variées, de sa très longue expérience en psychanalyse et avec La Rose Pourpre du Caire, il a su prouver combien il pouvait aussi accoucher de comédies à la fois délicieuses et « un peu plus éloignées » du réel. Qui d’autre que lui aurait pu imaginer cette idée fantastique de faire sortir d’un écran de cinéma un acteur séduit par une spectatrice assidue et avide de rêverie et de romantisme? A partir de ce canevas très original, Allen déploie des trésors dans ce scénario merveilleux, où il est moins question de cinéma que du pouvoir des fantasmes sur une réalité parfois trop dure à vivre. Son héroïne, Cécilia, souffre d’un mauvais mariage, d’une situation économique désastreuse (l’action se situe pendant la Grande Dépression, après le Krach de 1929) et se refugie dans les illusions que lui procure les films. Sur une mise en scène inventive, cet opus au ton doux amer glorifie l’enchantement, la magie des images, l’amour romanesque, même si dans son final, la réflexion se fait plus lucide, après des moments vraiment drôles et charmants. Avec une certaine malice, Woody fait de son héros Tom Baxter un homme doux et prévenant alors que la vedette qui l’interprète s’avère arrogant et cynique. Afin de mieux marquer la différence entre réel et imaginaire.
Alors en pleine période créatrice féconde avec sa muse Mia Farrow (12 films ensemble), Woody lui offre ce rôle formidable qu’elle endosse à la perfection, face à Jeff Daniels jouant le double héros romantique traversant l’écran pour rentrer dans la vraie vie. Parmi les seconds rôles, notons la présence de Danny Aiello en mari infidèle et peu attentionné et Dianne Wiest que Allen réemploiera notamment dans Coups de feux sur Broadway. Avec cette comédie savoureuse, l’auteur de Manhattan met en avant la magie du cinéma avec une poésie bien à lui et annonce par là même Alice, où son héroïne verra son existence bouleversée par l’hypnose. Cette Rose figure sans nul doute dans le peloton de tête de ses réussites majeures.
ANNEE DE PRODUCTION 1985.
