Indochine, fin des années 20. Une française de 15 ans et demie vit avec sa mère instit et ses deux frères, dont l’un est irascible et violent. Sur le bac qui la conduit à l’orphelinat de Saigon, elle fait la connaissance d’un élégant Chinois, qui la courtise d’entrée. Elle accepte de le revoir et naît entre eux une passion charnelle très forte…
Cette magnifique histoire est celle vécue et racontée par Marguerite Duras elle même, lorsqu’elle était adolescente et qu’elle vivait encore à Saigon. Elle relate cet amour dans un roman qui va pulvériser les records de vente et obtenir le Prix Goncourt en 1984. Le cinéma ne pouvait qu’avoir l’idée de l’adapter, et c’est Jean Jacques Annaud, le réalisateur de l’Ours, sous l’impulsion de son producteur d’alors Claude Berri, qui s’attéle à la tâche. Il en résulte un très beau film d’amour, où le lyrisme et le romantisme le plus échevelé trouvent toute leur mesure. Les paysages du Vietnam sont somptueux (notamment l’ouverture sur le Mékong), les rues grouillantes de la ville sont en opposition avec l’exiguité de la chambre, où les amants se retrouvent pour faire l’amour. La caméra s’attarde sur les regards, les frôlements de peaux (la séquence de la main dans l’automobile est sublime), les baisers et bien sûr sur le sexe. L’érotisme de certaines scènes, tout entier contenu dans des gros plans d’une grande délicatesse, sert de fil conducteur à un récit privilégiant la sensualité, le désir, l’attraction physique. Assez peu de dialogues, mais des sensations touchantes planent, tout au long du film.
Le metteur en scène du Nom de la Rose a pris une inconnue pour être cette jeune fille s’éveillant à l’amour: Jane March. Une anglaise au physique très avantageux et au visage très pur, sa peau diaphane ressemblant presque à celui d’une poupée. Son partenaire est Tony Leung , un superbe acteur chinois aux traits carrés et qui apporte infiniment à son rôle d’amant riche et amoureux. N’oublions pas également de souligner que l’autre thème majeur du script est la différence des cultures, ce refus d’unir deux races et de leur accorder le droit de s’aimer. C’est ce qui rend cette relation plus complexe qu’une simple fusion des corps. La voix de la narratrice nous envoûte dès le commencement pour ne plus nous quitter et quelle voix! Jeanne Moreau de son timbre grave et cassé enchante nos oreilles. Et bien entendu, ce final d’une suffocante beauté, où les émotions surgissent, éclatantes, accompagnées par une valse de Chopin et achèvent de nous conquérir.
ANNEE DE PRODUCTION 1992