Dans une petite ville allemande, au milieu des années 20, le digne Professeur Immanuel Rath enseigne dans un lycée où il est la tête de turc de certains élèves. Il sait que ces derniers fréquentent le cabaret L’Ange bleu et il s’ y tend un soir. Il tombe sous le charme de Lola Lola, une des danseuses du lieu. Allant à l’encontre de ses principes, il lui demande de l’épouser. Pour son malheur…
D’après le roman de Heinrich Mann, il s’agit là du film le plus célèbre du réalisateur viennois Josef Von Sternberg. L’histoire d’une déchéance: celle d’un homme respectable emporté dans les tourments du désir et de ses pulsions. Pour l’amour d’une tentatrice frivole, artiste de cabaret, il va subir l’humiliation de celui qui se retrouve déclassé, trompé, inutile. Ce poême pervers, aussi cynique que désabusé, fétichise l’idée de l’amour, joue avec les symboles ( le canari dans la cage pris au piège comme Rath) , et la densité érotique atteint son zénith dans les performances scéniques de Lola Lola, aguicheuse et « entièrement faite pour l’amour », comme le dit une de ses chansons. Sternberg expérimente pour la première fois le parlant et dans certaines séquences, le travail sur le son n’est pas tout a fait au point, gardant encore des « restes » du muet. Pour le reste, c’est un sans fautes : la réalisation utilise les intérieurs réduits des loges du cabaret ou de la salle de classe pour étouffer encore plus le pauvre professeur dans sa destinée funeste. De manière étrange et pourtant très nette, L’Ange Bleu est un film commençant dans l’euphorie, la comédie presque bon enfant et dérive lentement vers la tragédie cruelle.
En vedette masculine, l’acteur allemand Emil Jannings, fabuleux déjà dans Le dernier des hommes de Murnau, réitère avec ce rôle de perdant, victime de son aveuglement affectif. Mais le vrai potentiel se trouve chez Marlene Dietrich bien sûr, révélée par ce rôle sulfureux par celui qui va devenir son pygmalion à Hollywood. D’une sensualité hors du commun, elle incarne en beauté Lola Lola, précipitant la chute de celui qui l ‘a trop idéalisée . L’Ange Bleu reste un des films les plus importants du cinéma mondial, presque cent ans après sa sortie.
ANNEE DE PRODUCTION 1930.
