Charles Pellegrin, 45 ans, médecin à Arles, mène une vie sans histoire auprès de sa femme, Armande, de sa mère et de ses deux enfants. Sa rencontre fortuite à Marseille avec la jeune Martine le fait douter sur le sens de sa vie. Lorsqu’il fait d’elle sa maitresse et sa secrétaire et qu’il l’installe à Arles, il pense que tout va se dérouler au mieux…
Avant de devenir un des cinéastes du « samedi soir », attaché à la Qualité Française, que la Nouvelle Vague s’acharnera à décrier et de signer des classiques comme La Vache et le Prisonnier ou Le Clan des Siciliens, Henri Verneuil débuta sa carrière au début de la décennie 50 et se distingua avec ce second long métrage, adapté d’un roman de Simenon, Lettre à mon juge. Il en retire toutefois le caractère tragique pour conter cette histoire d’adultère dans une France encore rigide et conservatrice. Le personnage principal, un honnête docteur respecté par ses malades et installé dans une vie trop « carrée », succombe au fameux démon de midi et repense la totalité de son existence, à l’aune de cette passion charnelle naissante. Verneuil transcende le côté « ordinaire » du script par une description précise d’une ville de province étouffante, d’un carcan social devenant une prison pour son héros tiraillé par le devoir et l’envie de s’extirper de ce piège faussement confortable. Un peu comme il le fera dans son très beau Des gens sans importance quatre ans plus tard, il filme des êtres tenter par des envies d’ailleurs, afin d’éviter de moisir dans leur condition, quitte à être jugés et cloués au pilori. Le réalisateur ose la transgression, demeure chaste quant il s’agit de montrer les relations physiques et s’attache plutôt à capter le bouillonnement intérieur du héros, victime à la fois de ses pulsions, de ses envies et dans la foulée de sa jalousie excessive.
Il accorde très justement le rôle au comique bien connu de l’époque, Fernandel, afin qu’il fasse ses preuves dans un registre différent. Et le drame ne lui va pas si mal, puisque l’acteur campe ce docteur amoureux avec une conviction certaine, offrant des moments réellement émouvants. Le Fruit Défendu du titre s’incarne dans la présence étonnante de Françoise Arnoul, d’une sensualité troublante (dont on aperçoit même un bout de sein!! fait rare pour l’époque!), elle fera encore quelques films sous la direction de Verneuil. Fernandel, quant à lui, ne deviendra pas un comédien dramatique majeur, mais tournera également sept fois avec ce metteur en scène, jusqu’à La Vache et le Prisonnier. Malgré son classicisme un peu daté, ce film justifie d’être réhabiliter.
ANNEE DE PRODUCTION 1952.