1947. Sur une plage, Madeleine, serveuse dans un hôtel-restaurant, mère d’un petit garçon, fait la connaissance de François, étudiant riche et cultivé. Entre eux, c’est comme une évidence. La providence. Si l’on sait ce qu’elle veut laisser derrière elle en suivant ce jeune homme, on découvre avec le temps ce que François tente de fuir en mêlant le destin de Madeleine au sien…
Depuis le très sensible Réparer les Vivants sorti en 2016, nous étions sans nouvelles de la jeune réalisatrice Katell Quillévéré. Elle revient en cette fin d’année avec ce drame romanesque de très belle facture, situé dans l’après guerre, dans lequel un couple se forme alors que chacun garde enfouis des secrets mal assumés, devenant ainsi le terreau idéal pour une tragédie annoncée. D’une richesse thématique foisonnante, Le Temps d’Aimer s’inspire à la fois du vécu de la cinéaste, ainsi que d’un mélodrame américain de Douglas Sirk, Le Temps d’aimer et le temps de mourir. On y retrouve des sujets comme la difficulté d’être fille mère d’un enfant conçu avec l’ennemi, l’homosexualité encore pénalement répréhensible, les mensonges de couple, et l’importance de connaitre ses origines pour construire sa vie d’adulte. Katell Quillévéré utilise une mise en scène certes plutôt académique, mais l’intensité de son récit et plusieurs séquences montrent sa totale aptitude à faire jaillir des émotions brutes.
De même, elle évite intelligemment les pièges du pathos pour servir au contraire un mélodrame bouleversant. Le très beau tandem composé de Anaïs Demoustier et Vincent Lacoste achève de rendre le film poignant. Elle, décidément formidable de rôles en rôles, surprend dans les registres les plus variés. Lui, s’impose tranquillement depuis Les Beaux Gosses comme l’un des acteurs les plus doués de sa génération. Ce qui touche tant dans la trajectoire de ces êtres cabossés par la vie, c’est la modernité étonnante avec laquelle le récit assume son lyrisme. Un beau film à ne pas manquer.
ANNEE DE PRODUCTION 2023.