Martin Modot et sa famille sont victimes d’une fusillade à la gare de Deauville, visant en premier lieu un homme politique. Sa femme, sa mère et sa fille y perdent la vie. En deuil, seul et désespéré, Martin est contacté par Miller, le président d’une société d’autodéfense lui proposant de l’aider à retrouver les assassins, prétextant que la police ne mène pas correctement l’enquête. Après hésitation, il accepte, par désir primaire de vengeance…
Cinéaste français plutôt oublié aujourd’hui, Serge Leroy, fut pourtant l’auteur d’un excellent polar inquiétant intitulé La Traque, sommet de violence maitrisée et de séquences haletantes. A la fin de l’année 1981, juste après l’élection de Mitterrand aux présidentielles, l’abolition de la peine de mort en France provoqua la grogne de certains groupuscules d’extrême droite et de ligues conservatrices et c’est exactement à ce moment là que Leroy tourne ce polar tendu, contant la tuerie d’une famille ordinaire et l’envie pour le père survivant de se faire justice lui même. Sur un solide scénario de Manchette évitant un manichéisme facile, ce « revenge movie » s’éloigne du style d’Un Justicier dans la ville, complexifiant les rapports entre le héros, la police et le groupe d’autodéfense, instillant une ambiguité dans le rôle joué par chacun, et ne délaissant pas pour autant le suspense habituel d’un film policier classique. Bien réalisé (la séquence du massacre dans la gare découpée avec brio, l’errance du personnage principal dans un Paris obscur et nocturne), Légitime Violence s’apparente par son style sec au cinéma d’Yves Boisset, n’hésitant pas à dénoncer l’impuissance des institutions en place (policières et politiques). Des faiblesses se glissent dans la description des protagonistes secondaires, assez caricaturaux (notamment le dirigeant du groupe d’autodéfense, campé par Roger Planchon) et un léger temps mort survient en milieu de récit.
En dehors de ces réserves, il faut saluer la distribution, portée par un magnifique Claude Brasseur, sobre et intense en même temps. A ses côtés, des visages connus (Christophe Lambert, Thierry Lhermitte, Michel Aumont, Véronique Genest et même une toute jeune Valérie Kaprisky) apportent leur contribution de manière plus ou moins brillante dans cet univers glauque et rétro de ces années 80, à la photographie un peu délavée. Entre les flics véreux, les loubards à la gâchette facile, la trajectoire de cet être épris de vengeance constitue une incursion assez réussie dans la mode des films du même type qui viendront dans la foulée, entre autres Liste Noire ou Tir Groupé.
ANNEE DE PRODUCTION 1982.