De retour de la guerre, Vincent Bruce trouve un emploi d’aide soignant dans une clinique psychiatrique de la Nouvelle Angleterre. Très vite, il tombe sous le charme vénéneux de Lilith Arthur, une jeune et belle patiente atteinte d’une forme étrange de schizophrénie…
Contrariée par le maccarthysme, la carrière de Robert Rossen s’achève prématurément avec ce film étrange, insolite et mal aimé. Prenant un sujet à la mode à l’époque à Hollywood (à savoir la folie), il adapte un roman de J.R Salamanca, contant l’histoire d’amour tragique d’un jeune homme, revenu de la guerre assez perturbé, et d’une jeune fille enfermée dans un asile pour une perturbation mentale particulière: la nymphomanie. il faut savoir que l’on considérait ce syndrome comme une maladie mentale à ce moment là, et Rossen décrit une héroïne aussi belle que dérangée (même si de prime abord, elle semble totalement « normale »). La description poétique de cet amour fou entre deux individus marginaux et inadaptés a quelque chose d’inédite dans le cinéma américain, alors sous influence directement européenne. Rossen décrit le glissement progressif d’un être fragile mais raisonné vers l’univers fissuré mais séduisant de celle dont il est épris. En évitant de traiter la folie sous une forme hystérique comme dans Shock Corridor, le réalisateur dirige son récit plutôt vers de l’implicite, ce qui n’empêche pas un fond perturbant.
Curieusement empreinte de délicatesse, cette oeuvre, non exempte de défauts, marque des points dans sa faculté à fasciner, sans jamais en rajouter. L’abondance de gros plans, le montage heurté et un noir et blanc remarquable sont autant de qualités à reconnaitre à Lilith. Du côté de l’interprétation, rien à dire de spécial sur Warren Beatty, qui joue de son physique de beau brun ravageur et se montre crédible sans forcer. Par contre, le vrai choc demeure la composition envoutante et sublime de Jean Seberg. En pensionnaire aussi énigmatique que malfaisante, elle trouve son plus beau rôle, à peine trois ans après avoir explosé sous la caméra de Godard dans A bout de souffle. Dans la veine psychiatrique, ce film détonne par son traitement inhabituel, qui peut soit passionner, soit rebuter, selon la sensibilité de celui ou celle qui le découvre.
ANNEE DE PRODUCTION 1964.