Dans une banlieue chic de Boston, s’entrecroisent les destins de personnages en quête de bonheur. Deux couples se délitent: Richard, le mari de Sarah, fantasme sur les photos d’une pin up inaccessible, et Kathy, l’épouse de Brad, se consacre bien trop à son travail et néglige totalement son foyer. Après avoir fait connaissance dans le parc de leurs enfants, Sarah et Brad passent du temps ensemble et finissent par être attirés l’un par l’autre…
D’abord acteur de petits rôles, Todd Field s’est dirigé ensuite progressivement vers la réalisation avec un premier long métrage, In the Bedroom, salué par la critique internationale. Quelques années après, il réitère avec ce second opus attendu et confirmant un talent en devenir, surtout au niveau de l’écriture de ses scénarios. Il semble au premier abord traiter d’un adultère somme toute banal entre deux adultes malheureux dans leur couple respectif, sauf que l’atmosphère du film, faussement tranquille et intelligemment dérangeante, laisse entrevoir une deuxième « histoire » en parallèle: celle d’un homme revenu dans le même quartier, après avoir été condamné pour des faits d’exhibition sexuelle sur mineurs. La communauté du lieu s’insurge contre ce retour, à tort ou à raison, en tout cas ravive des passions enfouies, une haine latente, et met à jour les frustrations communes à chacun. La sexualité est ici vécue douloureusement: l’ancien taulard est considéré comme pestiféré et tente de lutter contre ses penchants, la femme mal mariée culpabilise d’abord de ressentir du désir avant d’y céder pleinement telle une Madame Bovary moderne, l’autre épouse est aussi magnifiquement belle que frigide, etc…. Todd Field parle avec justesse d’immaturité, de persistance dans l’erreur (individuelle et collective), de lâchetés, de la cruauté des humains quand ils se bornent à l’égoïsme. La mise en scène, feutrée et subtile, annonce déjà le futur immense film du cinéaste Tar, sorti tout récemment.
Dénonçant l’hypocrisie bourgeoise avec délectation, le film maintient un cap fascinant deux heures durant, avant de bifurquer vers un final beaucoup plus « moral » et en définitive décevant, retombant dans une réalité lisse que le film repoussait jusque là. A l’affiche, un très bon trio d’acteurs se frôle, se déchire, s’aime: Patrick Wilson avant sa consécration dans la franchise des Conjuring incarne un beau voisin sexy et infidèle, Jennifer Connelly campe une femme froide laissant son mariage dépérir, et enfin Kate Winslet, remarquable, joue l’épouse endormie, qu’un ardent désir pousse à imaginer qu’une vie meilleure est possible ailleurs. D’un certain côté, Little Children se rapproche du chef d’oeuvre de Sam Mendes American Beauty, sans en posséder la grâce infinie. Todd Field redonne de l’espoir à un cinéma américain indépendant assez endormi.
ANNEE DE PRODUCTION 2007.