Giorgio, peintre misanthrope, vit seul avec son chien Melampo, sur une petite ile corse. Sa solitude va être vite dérangée par l’arrivée d’une jeune femme, Liza, échappée d’un yacht où elle s’ennuyait. Liza, bourgeoise et très belle, se laisse séduire. Elle finit par tuer le chien et… prend sa place, prête à obéir en tous points à son maitre…
L’italien Marco Ferreri n’avait pas son pareil pour inventer des histoires singulières, hors des chemins tracés, s’insurgeant contre la société de consommation, haïssant les bourgeois, maudissant les principes et les lois, et faisait un cinéma « à part ». Un an avant son plus gros scandale, La Grande Bouffe, il tourna donc cette comédie dramatique très curieuse dans laquelle une femme renonce à toute dignité pour devenir la « chienne » de son homme, lui jurant fidélité, loyauté, dévotion totale. Sur un sujet aussi scabreux, on peut légitimement craindre le pire, même si Ferreri avait assez d’intelligence pour ne pas tomber dans une vulgarité facile et s’attache au contraire à dépeindre les rapports de domination et de soumission de ce couple pas comme les autres. Liza se veut plus frappant que choquant, audacieux en tout cas, Jean Claude Carrière collaborant au scénario y a indéniablement ajouté une certaine poésie et Ferreri filme le tout avec une douceur presque inhabituelle chez lui. Le film comporte des problèmes de rythme et tourne un peu en rond, surtout à mi parcours, quand le personnage de Giorgio tente un retour vers la civilisation et la ville pour lesquelles on sent qu’il cultive une aversion profonde. Marco Ferreri s’intéresse au masochisme de son héroïne mais sans sadisme, ce qui rend le propos sans doute plus insidieusement subversif, un peu à la manière d’un Bunûel.
Quelques mois seulement après avoir tourné Ca n’arrive qu’aux autres de Nadine Trintignant, le couple Catherine Deneuve/Marcello Mastroianni se reforme donc pour la deuxième fois, augmentant l’attrait, d’autant que les deux acteurs étaient aussi ensemble à la ville. Mastroianni s’avère, comme à son habitude, parfait sous les traits de ce peintre solitaire et Deneuve surprend par son jeu plutôt très convaincant dans un rôle ô combien casse gueule. La voir lécher la main de son maitre et adopter une attitude animale fut un choc pour beaucoup et Liza reçut un accueil glacial. C’est injuste, car s’il est indiscutablement inabouti, il n’est pas dénué de réelles qualités, à commencer par le courage qu’il faut bien reconnaitre à son auteur. Le courage d’avoir osé montrer l’image d’une femme acceptant de se « dégrader », alors que l’époque était en plein mouvement de libération féminine et sexuelle.
ANNEE DE PRODUCTION 1972.