Freddy Clegg, un employé de banque insignifiant, nourrit une passion pour les papillons, dont il est un fervent collectionneur. Il est également obsédé par une jeune étudiante, Miranda Gray, qu’il prend soin de suivre et d’épier plusieurs jours durant, avant de finir par la kidnapper. Il l’enferme dans la cave d’une grande maison isolée, à la campagne. A son réveil, il lui assure qu’aucun mal ne lui sera fait…
Quatre ans après l’étonnant La Rumeur (traitant d’homosexualité féminine très courageusement), William Wyler s’éloigne encore un peu plus des grosses productions hollywoodiennes qui ont fait sa renommée la décennie précédente, et adapte un roman de John Fowles, L’Amateur, contant l’histoire étrange d’un type ordinaire, seul, transparent aux yeux de tous et décidant d’enlever une jeune fille dont il s’est persuadé être amoureux. Tourné en Angleterre, L’Obsédé se penche donc sur le cas clinique de cet érotomane psychotique, dissèque la personnalité tortueuse d’un homme prêt à tout pour se faire aimer, déployant même des attentions à sa captive pour l’amadouer et la « séduire », tout en l’enfermant dans un lieu clos, comme il le fait avec les papillons qu’il conserve pour agrandir sa collection. Drame psychologique assez schizo, cet opus de Wyler décrit une relation ambigue entre deux individualités que tout oppose (l’amour, la classe sociale, le niveau culturel), un dialogue de sourds entre un bourreau et sa victime dans un climat pesant et malsain. Le film traite également des rapports subtilement sadomasochistes mis en place par ce ravisseur amoureux à sens unique. Il n’y a quasiment pas de violence physique (hormis une ou deux séquences de lutte), tout se joue au niveau mental et le vénéneux s’immisce peu à peu, jusqu’à une fatalité inexorable.
Le plus terrifiant dans ce conte cruel est que Miranda, l’héroïne prisonnière, tente par tous les moyens et jusqu’au bout de son calvaire de dénicher l’humain derrière le masque figé du « monstre » froid qu’elle a en face d’elle, mais elle se heurte à un mur. Il est aussi infranchissable que l’édifice de pierres dans lequel elle est verrouillée contre son gré. L’obsédé bénéficie d’une interprétation hors pair, un tandem qui a reçu un double Prix à Cannes: Terence Stamp, regard métallique et magnétique à la fois, quelques années avant sa consécration dans Théorème joue ce psychopathe sexuel avec une puissance rare, et Samantha Eggar lui donne la réplique dans un rôle moins trouble. D’un réalisme indiscutable, cet opus de Wyler compte parmi ses plus aboutis, tout inconfortable qu’il puisse être.
ANNEE DE PRODUCTION 1965.