La reine mourante d’un royaume enchanté fait promettre à son mari de n’épouser en secondes noces qu’une femme plus belle qu’elle. Or, seule sa propre fille la surpasse en grâce et en beauté. Le roi demande la main de cette dernière. La Fée des Lillas conseille alors à la jeune fille de feindre les caprices les plus extravagants, afin de décourager les assauts paternels.
En mettant en chantier ce projet d’adaptation filmée d’un joli conte de Charles Perrault, le réalisateur Jacques Demy, fort des succès des Parapluies de Cherbourg et des Demoiselles de Rochefort, trouve là un médium parfait pour explorer à nouveau ses thèmes favoris: la féerie, le chant, les couleurs vives, la poésie et une kitscherie assumée. Grâce à une forme esthétique très sophistiquée, le film a traversé les époques et a fini par devenir culte, avec ses séquences inoubliables telles que la préparation du cake d’amour (en chanson s’il vous plait!), la fuite éperdue de Peau D’Ane à travers les bois, la rose dont les pétales parlent d’amour, et cette fée magique, incarnée par Delphine Seyrig, parée de costumes superbes. Comme dans tout conte qui se respecte, on parle de sentiments bien sûr, même si ici il a un caractère incestueux, le père désirant épouser sa fille au delà de la morale revêt l’aspect du fantasme d’un amour perdu. Les trucages, dignes de Méliés, sont à la fois naïfs, archaïques, mais tout à fait charmants, ainsi que les décors bleutés du palais royal, tournés en grande partie au château de Chambord.
Demy n’a pas son pareil dans le cinéma français pour conter des histoires merveilleuses, avec gaieté, humour et nostalgie. N’oubliant pas au passage de rendre un hommage appuyé à Jean Cocteau, le maître du genre, on retrouve des clins d’oeil à Orphée et à La Belle et la Bête et la présence de Jean Marais confirme l’admiration de l’auteur de Lola pour le poète. Les autres illustres références sont à chercher du côté de Walt Disney et des peintures de Gustave Doré. L’approche naturaliste a pu décontenancer le public, mais la bonne humeur et les chansons délicieuses égrenant l’action ont conquis les coeurs et les oreilles des petits et des plus grands aussi. La musique de Michel Legrand, complice de Demy, délivre des mélodies d’une grande subtilité, aux relents baroques plaisants et intemporels. Enfin, la distribution met également la barre très haut, outre Marais et Seyrig, on retrouve surtout Catherine Deneuve, en princesse idéale de fraicheur et de beauté. Sa silhouette et son visage délicat capte la lumière comme personne et envoûte le jeune prince Jacques Perrin, tout de suite foudroyé devant cette apparition angélique. Cinquante ans après, cet enchantement musical continue de faire son effet et d’enrichir nos rêves et notre imaginaire.
ANNEE DE PRODUCTION 1970.
Très diffusé dans les écoles primaires !
A écouter aussi la critique du masque :
https://www.franceinter.fr/cinema/peau-d-ane-de-jacques-demy-50-ans-apres-qu-en-pensent-les-critiques-du-masque-la-plume