André Laurent, capitaine du remorqueur Le Cyclone, assiste avec son équipage à la noce de ses marins, avant d’être appelé en urgence pour secourir les passagers d’un cargo, dont Catherine, l’épouse du commandant. Alors que sa femme lui dissimule une maladie grave et le supplie de prendre sa retraite, André tombe follement amoureux de Catherine, avec laquelle il débute une liaison…
A quelques semaines de la Seconde Guerre Mondiale, le tournage de Remorques démarrait sans se douter combien il allait être chaotique, interrompu, reporté pour ne se terminer qu’en Septembre 1941! Ce très beau poème d’amour, scénarisé et dialogué par Jacques Prévert dont on reconnait immédiatement la patte dans une écriture fine et sensible à la fois, annonce déjà le réalisme poétique du cinéma de Marcel Carné. Derrière la caméra, Jean Grémillon, un cinéaste amoureux de la mer à qui l’on doit Gueule d’Amour,offre une mise en scène pleine de lyrisme, des images en noir et blanc somptueuses, et ne néglige pas non plus une dimension sociale, en montrant le quotidien de ces marins consacrant leur vie entière à leur passion. Les décors naturels de Brest et les éléments marins répondent parfaitement aux déchirements du coeur des personnages, qu’ils soient à la fin d’un mariage malheureux comme Catherine ou dans la routine d’une union sans surprises comme André. Leur rencontre va bouleverser le cours trop tranquille de leur existence. Grémillon ne verse pas dans du mélo à la petite semaine, il préfère la tragédie pure et nette, de celles qui sont sans appel.
Il reforme pour l’occasion le couple mythique Gabin/Morgan après Quai des Brumes, ayant compris que leur alchimie à l’écran allait servir totalement son propos. Pour leur faire face, une comédienne discrète et solide, Madeleine Renaud, incarne l’épouse fidèle et digne jusqu’au bout. Remorques ne compte curieusement pas dans la liste des classiques incontournables du cinéma français, peut être à cause de sa genèse compliquée et parce que Grémillon n’a pas eu les faveurs des critiques autant qu’il le méritait. Il est plus que temps de réhabiliter ce réalisateur et cette oeuvre là en particulier.
ANNEE DE PRODUCTION 1939/1941.