Dans les années 20, la romancière Virginia Woolf entame l’écriture de son roman « Mrs Dalloway ». Elle lutte contre la dépression et la folie. Plus de vint ans après, à Los Angeles, Laura Brown, une américaine lit cet ouvrage et malheureuse en ménage, elle décide de tout quitter pour changer de vie. Enfin, à New York, cinquante ans plus tard, Clarissa Vaughn, une version moderne de Mrs Dalloway, soutient Richard, son ami poète malade mourant du Sida. Comment ces trois femmes sont elles liées les unes aux autres, par quel indicible point commun?
Billy Elliot fut le premier coup d’éclat du cinéaste anglais Stephen Daldry en 2000. Il récidive avec ce très beau drame, en adaptant le livre de Michael Cunningham, racontant comment le roman de l’écrivaine Virginia Woolf influence la vie de deux femmes, à des décennies d’écart, comment le regard qu’elle leur porte modifie le cours de leur existence. C’est donc un film sur la littérature à la structure complexe, mais très originale! Daldry se joue du temps, mélangeant trois époques, trois femmes, trois points de vues. La narration, brillante par son intelligence et sa sensibilité, n’apporte pas toutes les réponses aux questions soulevées par le film: quel est ce mal être, cette prison mentale dont souffrent les héroïnes? Une forme de dépression, ou plutôt une grande lucidité sur leur existence qu’elles jugent futiles et leur recherche d’un impossible bonheur a fini par les épuiser. Mélo métaphysique sur fond de drame intime, The Hours évoque aussi bien les névroses féminines que l’obsession du suicide. Des thèmes certes peu joyeux à priori, mais que Daldry traite justement avec le moins de complaisance possible.
Cette oeuvre moins classique qu’elle en a l’air fourmille d’émotions enfouies qui surgissent ça ou là, au gré de séquences intenses et d’une merveilleuse mélancolie. La partition superbe de Philip Glass accompagne des images d’une grande beauté, baignant dans une ambiance de tristesse latente. Et bien au delà de tout le reste, le trio d’actrices employé met la barre très haut au niveau de l’excellence. Meryl Streep n’étonne plus vraiment avec son immense talent toujours intact, Julianne Moore réalise une partition, tout en silences et regards de détresse, très émouvante. Enfin et surtout Nicole Kidman incarne une méconnaissable Virginia Woolf, au delà de sa transformation physique, son jeu a soulevé l’enthousiasme général. Jusqu’à lui permettre de décrocher l’Oscar de la Meilleure Actrice. Le reste du casting (Ed Harris, Toni Colette, Jeff Daniels notamment) marque aussi des points. Un film qui parle à chacun d’entre nous par sa déchirante vision de notre place sur Terre.
ANNEE DE PRODUCTION 2003.