En Haiti, sur l’ile de Port au Prince, au début des années 80, trois américaines d’âge mûr, Ellen, Brenda et Sue sont là comme tous les ans exorciser leur solitude et leur frustration sexuelle dans les bras de beaux et jeunes hommes Noirs, qu’elles payent pour passer du bon temps. Ellen et Brenda vont se partager, non sans se jalouser, les faveurs d’un seul, Legba, un gigolo souriant et énigmatique…
Remarqué pour la première fois avec Ressources Humaines, le français Laurent Cantet aime assez mêler les trajectoires intimes de ses personnages avec un propos politique sous jacent. Il s’intéresse cette fois au tourisme sexuel, conjugué au féminin, mettant de nouveau l’argent au centre de son récit. Suivant le parcours de trois quinquagénaires cherchant de jeunes gigolos pour satisfaire leur libido en berne, tout en profitant de leurs vacances au bord de mer, Cantet pose un regard assez neutre sur le fonctionnement de ces échanges charnels tarifés, évitant de filmer trop facilement du sexe. Les trois femmes, chacune à tour de rôle, s’expriment face caméra et raconte leurs désirs, leurs existences mornes, assumant plus ou moins bien leur âge. Le réalisateur émaille sa narration de quelques allusions sur la dictature en place à Haiti, sur la misère galopante, sur la condition difficile de la population locale, et en parallèle décrit l’insouciance de ces touristes à peine concernés par ce qui les entoure. On voit les femmes vendre leur corps alors qu’en début de film, une mère vient offrir sa fille mineure à un cadre de l’aéroport , juste pour espérer survivre.
Pas mal de séquences répétitives dans lesquelles rien de très excitant n’advient prennent trop de place au détriment d’un réel enjeu de scénario. La rivalité entre la romantique Brenda et la cynique et désenchantée Ellen ne reste qu’à l’état d’ébauche, et même si ce n’est pas le sujet principal du film, Cantet aurait mieux fait de le creuser davantage. En tête d’affiche, Charlotte Rampling, encore très belle pour ses 55 ans, tient un rôle sulfureux qui ne la dépayse guère, après ses prestations chez Cavani, Oshima ou Chéreau. Les deux autres comédiennes (Karen Young et Louise Portal) sont plus ternes. L’ensemble ne connait aucune fulgurance et laisse une impression mitigée. Sur le même thème du tourisme sexuel, l’autrichien Ulrich Seidl a signé une oeuvre bien plus dérangeante et glaçante au titre ironique: Paradis Amour.
ANNEE DE PRODUCTION 2006.
