Jill, très belle jeune blonde, monte à Paris pour devenir danseuse. Remarquée par un photographe, elle passe des castings et devient une vedette de cinéma. Très vite sacrée star, sa vie devient un enfer: elle est harcelée jour et nuit par une horde de paparazzis et une presse dévorante. Elle s’entiche d’un intellectuel italien, Fabio Rinaldi, avec qui elle vit une idylle à Genève, fuyant le tumulte parisien…
Il a suffit que Louis Malle, réalisateur des Amants, soit touché par le récit du quotidien de Brigitte Bardot, alors en pleine gloire hystérique, elle qui racontait combien sa vie de femme n’existait plus, qu’elle ne pouvait plus « rien faire normalement », pour qu’il décide d’en faire un film de fiction. La génèse de Vie Privée vient tout simplement de là, de ce désir de tracer un portrait le plus proche possible du vedettariat vécu par BB. Appelée Jill, son héroïne n’est en fait qu’un double parfait de la vraie Bardot et devient le seul sujet tangible à traiter. Son scénario, bien faiblement construit sur des anecdotes véridiques (comme l’épisode de l’ascenseur, où une mégère jalouse agresse verbalement la star) ne décolle jamais vraiment du sol par la faute d’une absence de point de vue. Malle n’était pourtant pas un mauvais réalisateur, mais ici gros coup de mou: il semble dépassé par son propos (montrer les affres de la célébrité reste une idée valable, sauf qu’elle est seulement traitée en surface). Vie Privée ne s’intéresse qu’à Bardot, au détriment des autres personnages, apparaissant comme des fantômes inconsistants, peinant à donner du corps au récit. Malle semble enfoncer des portes ouvertes quand il parle de la cruauté de la presse, du désir cannibale du public de vouloir sans cesse « accaparer » celle qu’ils ont adulé et mis sur un piédestal.
Niveau jeu, on connait les limites de Bardot, hormis quand elle est dirigée par des grands (Autant Lara pour En cas de Malheur, Clouzot pour La Vérité et bien sûr Godard pour Le Mépris): dans cette sorte de documentaire de sa propre vie à peine romancée, elle se contente d’être elle même, mutine, boudeuse, lascive, et bien sûr d’une beauté incomparable, filmée sous toutes les coutures. Son partenaire, Marcello Mastroianni, a même du mal à imposer son charisme (pourtant réel) face à elle, il paraît éteint. Dans un ensemble globalement médiocre, subsiste un final aussi tragique que somptueux: depuis un toit, BB chute au ralenti sur l’air déchirant du Miserere du Requiem de Verdi. Un plan de toute beauté pour un film si fade.
ANNEE DE PRODUCTION 1962.