Dans une quartier calme d’une ville américaine, Cécilia Lisbon, âgée de 13 ans, tente de se suicider. Ce drame va bouleverser toute la famille qui change alors son mode de vie. Elle et ses quatre soeurs se retrouvent de plus en plus soumises à l’autorité possessive de leur mère, jusqu’à ne plus pouvoir sortir de chez elles. Quatre garçons intrigués par leur beauté se mettent à les observer nuits et jours…
Pour ses débuts de toute jeune réalisatrice, Sofia Coppola, nourrie par un héritage non négligeable dans le cinéma, évoque un véritable fait divers survenu dans une petite ville du Michigan dans les années 70 et dynamite à sa façon le « teenage movie ». Avec son ambiance à la fois vaporeuse, planante et morbide, Virgin Suicides traduit subtilement l’insaisissable mal être de cinq soeurs, vivant quasi cloitrées par des parents frileux à leur permettre de vivre leur adolescence, de découvrir leurs premiers émois amoureux. Sofia Coppola utilise le récit en « flash backs », faisant raconter aux garçons la perception qu’ils ont gardé de ces filles au mystère insondable, refuse toute dramatisation superflue, s’autorise même de la légèreté dans un climat pourtant pesant. Dans des décors rose bonbon trompeurs, le récit se déroule l’air de rien avec des séquences annonçant en creux la tragédie à venir, avec quelques pointes sombres montrant juste la vie qui passe, puis qui cesse… Les images suggèrent des réminiscences, des rêveries éveillées, des souvenirs flous, comme si les événements relevaient d’un fantasme collectif, seulement « brisé » par les scènes plus crues et brutales, dans lesquelles la mère surtout brûle l’avenir (et les disques vinyles) de ses filles tout en croyant leur donner la meilleure éducation possible.
Le casting comprend Kathleen Turner et James Woods dans le rôle des parents, jouant sèchement leur partition avec leurs visages fermés et contrastant incroyablement avec les traits des cinq filles, d’une blondeur presque irréelle, grâcieuses et cependant rongées par un mal de vivre que Sofia Coppola ne cherche pas à expliquer avec de faux arguments. Parmi elles, la jeune Kirsten Dunst, à l’aube d’une jolie carrière, tient le rôle de la soeur ainée et trimballe avec elle une mélancolie indicible parfaitement adéquate. Ce galop d’essai de la cinéaste fit le tour du monde, éblouissant plusieurs festivals par sa maitrise formelle, par le choix judicieux de sa BO collant aux seventies et la partition idéale du groupe Air, soulignant à merveille la fin de l’innocence.
ANNEE DE PRODUCTION 1999.