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VIVIEN LEIGH

1913/1967

Née en Inde en 1913, Vivien Hartley de son vrai nom est issue d’une riche famille anglaise, cultivée, raffinée, et très tôt sensibilisée à l’Art en général, aux spectacles vivants, et à la scène. Pendant son adolescence, elle apprend plusieurs langues comme le français, l’italien et l’allemand et possède une aptitude à être curieuse de tout, une soif de connaître et une vive intelligence. Elle étudie l’Art dramatique à la Royal Academy de Londres, se marie très jeune à un brillant avocat qui désapprouve sa vocation d’actrice, ce qui ne l’empêche pas de mener sa barque à sa façon et de commencer à tourner quelques films mineurs, mais formateurs. Elle se lance également le défi de jouer au théatre des pièces du répertoire classique, notamment Diderot, Noel Coward et surtout Shakespeare devenant très vite la référence majeure de la jeune femme. Cette passion frénétique pour le spectacle l’habite totalement et la double chance de Vivien est que non seulement elle est dotée d’une beauté étourdissante, mais qu’en prime elle a un don inné pour le jeu et même l’incarnation. Un réalisateur hongrois du nom d’ Alexander Korda la remarque et lui fait signer un contrat de cinq ans, et la fait tourner dans deux de ses productions Dark Journey et surtout Vedettes du pavé, avec Charles Laughton. Ces deux rôles la lancent vraiment, ainsi que le film 21 Days, où elle donne la réplique au plus grand acteur anglais de l’époque Sir Laurence Olivier. Elle tombe éperdument amoureuse de son partenaire et sa vie va devenir un véritable conte de fées. Ca n’est que le début… et elle a à peine 25 ans!

Vivien considérait Laurence comme le plus grand comédien du monde, au delà de l’amour qu’elle lui portait en tant que compagne, son admiration professionnelle pour lui était illimitée. Aussi, lorsqu’il est appelé à Hollywood, elle décide de le suivre, tout en sachant que son nom à elle n’est encore pas très connu des américains. Certes, ses quelques films anglais ont traversé l’Atlantique et ont eu un peu de succès, mais elle n’a rien d’une Star. Plus pour longtemps… David O’Selznick cherche en vain à ce moment là celle qui incarnera Scarlett O’Hara, l’héroine sudiste du best seller Autant en emporte le vent, écrit par Margaret Mitchell. On dit que les auditions et les bouts d’essai de centaines de prétendantes au rôle ont duré plus de deux ans, coûté une fortune et n’ont pour l’heure rien donné! Des stars comme Bette Davis et Paulette Goddard ont failli l’obtenir du fait de leur statut et de leur côte au box office, mais Selznick n’est pas convaincu. Quand il croise Vivien, c’est la révélation totale pour lui! Il sait qu’il tient là sa Scarlett. Il l’engage donc pour être de tous les plans de la superproduction la plus chère de l’année 1939. Son partenaire est le séduisant et classieux Clark Gable. Tout a été dit et écrit sur le tournage faramineux et dantesque de Gone with the wind, les différents réalisateurs ayant travaillé sur le film (Cukor et Fleming seront derrière la caméra), les caprices des uns , les exigences des autres… Il n’empêche que Vivien trouve là sûrement le plus beau rôle féminin qui puisse exister dans toute l’Histoire du Cinéma. Tour à tour enfant gâtée, amoureuse obstinée, femme cupide, pétrie d’orgueil, épouse égoiste mais personnage de battante quelque soit les circonstances de sa vie, elle crève l’écran par son charisme inoui, son jeu ample, précis, et un tempérament exceptionnel. Son interprétation est si inspirée qu’elle décroche l’Oscar de la meilleure actrice, tandis que le film lui même rafle tous les prix possibles, et engrange des millions de dollars de recettes. Elle devient en un rôle une star incontournable.

Le couple Leigh/Olivier, plus amoureux que jamais, forme ensuite un duo des plus glamours dans Lady Hamilton en 1941, à nouveau produit par Korda, venu aussi d’Angleterre pour récolter les miettes du fabuleux succès de ses interprètes. Ils ont tout pour eux: ils s’aiment d’un amour intense et flamboyant, sont devenus des mythes en peu de temps, et sont perçus comme les comédiens les plus doués qui soient. Bref, ils sont intouchables et profitent de leur gloire avec l’insolence de ceux qui ont cravaché pour atteindre les sommets. Bien qu’elle soit réclamée et courtisée par le Tout Hollywood, Vivien renâcle à tourner n’importe quoi à n’importe quel prix. Son exigence de comédienne accomplie lui interdit de se compromettre dans des mauvais projets et du coup, elle décline des centaines d’offres, ne tournant rien jusqu’à la fin de la guerre, qu’elle ira passer en Angleterre. En 1945, elle revient devant la caméra pour César et Cléopâtre d’après George Bernard Shaw, un film en costumes ultra cher qui sera un… bide hélas! A trop vouloir se faire désirer, Vivien a déçu les attentes et même si elle y joue très bien, c’est la mise en scène elle même qui ne va pas, et le résultat donne un produit ampoulé et ennuyeux. C’est le commencement d’une série de coups durs pour l’actrice, qui n’iront qu’en s’amplifiant. En 1946, elle apprend qu’elle est atteinte de tuberculose sévère et doit encore réduire son rythme de travail. L’année suivante, Julien Duvivier le cinéaste français lui propose l’adaptation du roman de Tolstoi, Anna Karénine, qu’elle adore, et elle décide de faire oublier Greta Garbo qui l’avait joué dix ans auparavant. Sa composition est forte et émouvante, mais là encore le film ne récolte pas le succès attendu.

A peine elle vient de fêter ses 32 ans, que Vivien connait son tout premier épisode de dépression grave, dû à son état de santé, ses échecs au cinéma, et aussi son union orageuse avec Laurence qui contrairement à elle, enchaine les triomphes et la reconnaissance. Le fossé qui sépare à présent les deux amants se creuse encore un peu plus lorsqu’elle se met à boire, à consommer quelques drogues ou quelques médicaments pour « tenir le coup », sans parler de son addiction légendaire pour la cigarette. Alors qu’elle joue Antigone au théatre , elle reçoit un coup de fil d’Elia Kazan qui insiste pour lui offrir le magnifique rôle de Blanche Dubois dans son adaptation d’Un Tramway nommé Désir. Le film sortira en 1951 et sera l’occasion pour Vivien de savourer un immense succès (critique et public), la remettant en selle avec faste et l’excellence de son jeu ravit l’ensemble de la profession. Face à Marlon Brando animal et électrique, elle se laisse filmer défaite, névrosée, prématurément vieillie. Le personnage imaginé par Tennessee Williams est d’une complexité presque aussi riche que celui de Scarlett O’Hara. Un deuxième Oscar lui est décerné, à très juste titre. Vivien n’a que 38 ans, mais en parait  quasiment dix de plus. La lente dégradation a déja commencé son travail de sape!

Mais une nouvelle fois, la conquête passionnée d’Hollywood par l’actrice née va rester sans lendemain. Certains prétendent que si elle est si juste dans le rôle de Blanche, c’est parce que dans sa vie personnelle, elle glisse aussi peu à peu dans une folie que personne ne comprend. Laurence Olivier la fait examiner par des médecins éminents, et le verdict tombe: bipolarité à tendance paranoïaque. Une maladie mentale terrible d’autant qu’à cette époque, elle est mal connue et inégalement bien traitée. Avec des doses de lithium monstres et des anxiolytiques à haute dose, elle peut bon an mal an mener une existence presque normale. Avec ses nerfs malades, ses obsessions et sa jalousie démesurée, elle en fait voir de toutes les couleurs à Olivier, toujours fortement amoureux d’elle et qui la veille, comme un infirmier quand elle est au plus mal. En 1954, elle entame le tournage de La Piste des Elephants sur l’Ile de Ceylan, mais craque au bout de quelques jours, ne supportant ni l’équipe ni les conditions de travail et elle tombe dans un second épisode dépressif majeur, l’obligeant à démissionner. La relève n’est pas loin: Liz Taylor, nouvelle star montante, prend le relais. Elle ne le sait pas encore, mais elle ne va plus tourner que deux films avant sa triste fin. Il n’y a qu’au théatre qu’elle trouve encore des applaudissements, de la chaleur du public venu l’admirer dans MacBeth en 1955 ou dans Occupe toi d’Amélie, la pièce de Feydeau, où elle est merveilleuse. Son tempérament difficile et ses sautes d’humeur imprévisibles (surtout liées à sa maladie) sont très mal vues dans le milieu du cinéma, et sa réputation ne fera que se ternir davantage avec son divorce houleux avec Olivier en 1960. La plus belle partie de sa vie s’achève avec leur séparation et le conte de fées se transforme alors en insidieux cauchemar…

Le dernier acte va durer six ans et ressemble à un mauvais mélodrame, où l’héroine finit mal, entre déchéance, larmes, et douleurs multiples. Elle tourne à Rome en 1961 dans une oeuvre de José Quintero, metteur en scène de théatre et peu habitué à la caméra, intitulée Le Visage du Plaisir où elle s’impose dans un personnage de quadragénaire légèrement nymphomane, bouffie par l’alcool, et se payant les charmes d’un Warren Beatty débutant et d’une insolente beauté. Ce retour au travail semble la revigorer quelque peu et elle reprend du poil de la bête, à défaut de retrouver son rayonnement d’antan. Mais le film sort dans l’indifférence générale, le sujet étant trop tabou pour une époque frileuse, il deviendra culte des décennies plus tard. Un autre homme est rentré dans sa vie depuis peu, Jack Merrivale, ancienne doublure de son ex mari (ca ne s’invente pas!!), cherchait elle encore Olivier sous les traits de cet amant prêt à tout pour lui adoucir un quotidien ponctué de nombreuses crises de colère soudaine, d’humeur agressive, son déséquilibre mental ne faisant que s’accentuer au fil du temps ? En tout cas, son ultime apparition à l’écran date de 1965, dans La Nef des Fous (un titre ô combien cruel au vu de son état), elle y partage l’affiche avec Simone Signoret et José Ferrer. Sa composition de femme vulnérable, pour ne pas dire aux abois, est si proche de la créature farouche et désespérée qu’elle est devenue à la ville que c’en est troublant. Elle y apparait les traits très marqués, la tuberculose ayant gagné du terrain dans son corps et les traitements impitoyables ont ravagé son beau visage de jeunesse. Les années ont défilé depuis Scarlett, presque 30 ans après, elle n’est plus qu’une petite chose apeurée, perdue, et qui passe ses journées assise devant une fenêtre, ressassant ses souvenirs d’un temps révolu. Ce glissement du rêve vers une vie faites de tant de malheurs personnels fut une blessure mortelle pour elle. Un soir de juillet 1967, Vivien rend l’âme à 54 ans seulement, rejoignant les étoiles du ciel londonien qui, cette nuit là, accueillaient une lumière jadis éblouissante. Une grande actrice emportée par le vent de ses multiples tourments.

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