En 1970, le département de l’Oise est terrifié par une série de meurtres de jeunes auto stoppeuses. L’enquête est confiée à la gendarmerie, mais en dépit d’importants moyens mis en oeuvre et des pièges tendus au meurtrier, les recherches demeurent vaines. Et pour cause puisque le coupable se trouve être un des gendarmes de l’équipe, un des plus sérieux et des plus « irréprochables »…
Inspiré par l’affaire Alain Lamare qui avait marqué les annales judiciaires à la fin des années 70, l’intrigue se concentre sur l’évocation de la traque de ce dangereux serial killer, ayant sévi en toute impunité de longs mois durant, en semant la terreur dans une tranquille banlieue parisienne. Il s’agit du troisième long métrage de Cédric Anger, après deux timides opus Le Tueur et L’avocat, et il fait preuve ici de beaucoup plus de nerfs et de maitrise pour raconter la trajectoire de ce tueur pas comme les autres, gendarme ordinaire le jour et psychopathe rongé par ses démons la nuit. Anger ne s’intéresse pas au suspense proprement dit, il va directement à l’essentiel, ne cache pas l’identité de l’assassin et son script s’articule plutôt autour de son profil psychologique. Le réalisateur décrit ainsi les mécanismes effrayants de la schizophrénie, le fonctionnement mental avant et après les passages à l’acte et décrypte un esprit malade et retors. Grâce à une mise en scène glaçante, le film se place dans la catégorie des polars sombres et réalistes, d’autant plus qu’il relate les faits exacts à partir de compte rendus et de procès verbaux de l’époque. Quelques faiblesses sont cependant à remarquer: l’utilisation d’une musique un peu « en trop » dans certaines séquences, soulignant inutilement une angoisse que l’ambiance distille déjà fort bien, ainsi que la pauvreté des seconds rôles qu’il aurait fallu doter de plus de « chair ».
Pour incarner ce tueur implacable au double visage, Cédric Anger a été très inspiré de choisir Guillaume Canet, dans un quasi contre emploi, car il s’avère excellent. Avec son jeu nuancé, l’acteur propose une interprétation impressionnante, à mettre au crédit de son talent parfois discutable. Pour l’accompagner, la jeune Ana Girardot, comédienne discrète notamment vue chez Cédric Klapish, jouant la petite amie aveuglée par ses sentiments. La Prochaine fois je viserais le coeur atteint bravement sa cible, rappelant au passage les grandes oeuvres de Melville et de Corneau, redonnant au thriller ses lettres de noblesse. Un film froid et déstabilisant.
ANNEE DE PRODUCTION 2014.