En Amérique du Sud, en 1750, le frère jésuite Gabriel fonde une mission sur les terres des Indiens Guaranis. A la même époque et dans ses lieux vit Mendoza, un aventurier mercenaire. La rencontre des deux hommes va d’aboutir à la consécration en tant que prêtre de Mendoza, puis à leur combat pour lutter contre la domination espagnole et portugaise…
Deux ans après avoir dénoncé dans un film bouleversant, La Déchirure, les exactions du régime Khmer Rouge au Cambodge et le génocide dont il s’est rendu coupable, le réalisateur britannique Roland Joffé céda aux sirènes d’Hollywood et se lança dans l’élaboration de ce grand film historique, revenant sur un autre épisode sombre de l’Histoire: la colonisation espagnole et portugaise détruisant les terres des indiens d’Amérique du Sud, délogés de leurs territoires naturels, malgré le soutien de prêtres acquis à leur cause. Mission a tout du spectacle visuel total (l’action se situe autour des fabuleuses Chutes d’Ignazu vers la frontière entre l’Argentine et le Brésil), de la fresque épique avec ses centaines de figurants, l’immensité des paysages ajoutant une métaphysique à ce récit humain. Un film qui en appelle aux sens autant qu’à l’entendement, magnifié par une BO de toute beauté écrite par Ennio Morricone. Différentes logiques se confrontent: celle du pur missionnaire n’ayant que l’amour pour religion, celle de l’ex mercenaire plus prompt à réagir avec la violence et l’instinct et enfin la logique de l’évêque, désireux de fermer les missions et condamnant les indiens à retourner à leur vie sauvage. Joffé propose ses points de vue avec une certaine fluidité, accorde du temps à chacun pour poser ses idéologies et puis termine par un combat admirable, où hélas c’est le sang et les armes qui ont le dernier mot.
Peut être peut on reprocher toutefois à Joffé de ne pas assez développer les seconds rôles et de se laisser tenter par l’envie (légitime) de faire surtout un « beau film » à regarder par la grandeur de ses images, même s’il n’empêche pas une réflexion généreuse. Mission nous gratifie aussi d’un duo magique, Robert de Niro/Jeremy Irons, des pointures au jeu aiguisé et profond, se complétant fort bien, aucun ne cherchant à tirer la couverture à lui. Teintée d’un humanisme qui fut jugé excessif à sa sortie, l’oeuvre remporta la Palme d’Or à Cannes, une palme contestée par certains, jugeant le film trop manichéen. Roland Joffé n’a ensuite pas retrouvé la même inspiration et Mission reste son film le plus ambitieux.
ANNEE DE PRODUCTION 1986.