La vie et le combat de John Reed, un militant communiste, des années 1915 à 1920. Sa relation avec la journaliste et femme de sa vie Louise Bryant, son rôle politique fort, ses engagements, jusqu’à sa mort du scorbut, en Russie, à l’age de 32 ans.
Cette fresque ambitieuse et somptueuse a été initiée, pensée, produite, réalisée et jouée par Warren Beatty, l’acteur star de Bonnie and Clyde, Shampoo, ou La fièvre dans le sang. Pendant plusieurs années, il s’est battu pour monter ce projet d’autant plus risqué que la majorité des américains avaient oublié cette figure politique du début du 20e siècle, le but était de raviver la flamme et de rendre hommage à sa mémoire. John Reed est un homme qui est mort pour ses idées, qui croyait dur comme fer à l’idéal communiste, à la possibilité d’un monde nouveau, sans capitalisme, sans entraves morales. Beatty dépeint ce personnage hors du commun avec conviction et passion, apportant du souffle à un récit épique, mais aussi lyrique. Il insert aussi des témoignages de gens ayant réellement connu Reed, pour appuyer le propos, pour clarifier des points que le scénario doit parfois éluder. La première partie s’attache à raconter la rencontre clef entre John et la journaliste Louise Bryant, dont il va tomber amoureux, l’entraînant dans son combat, presque malgré elle. Ils connaissent les joies de l’amour libre, avant de finir par se marier. Idée bourgeoise qu’ils réfutaient pourtant.
Le personnage d’Eugene O’Neill, l’écrivain aussi attiré par Louise, est interprété par Jack Nicholson et on peut remarquer à quel point il le joue de façon sobre et presque introvertie, ne prenant jamais le dessus sur le couple vedette, emmenés par Diane Keaton (délicate et superbe) et Warren Beatty lui même ultra investi, et épousant en totalité les motivations de cet homme entier et radical dans ses idées. Au delà du simple film d’acteurs, la reconstitution est belle, ample, avec seulement quelques longueurs, mais le mélange de romanesque et de politique s’avère plutôt cohérent et équilibré. Ne traiter que de la révolution bolchevique dans laquelle notre héros est engagé, corps et âme, aurait été fastidieux et lourd pour le public. Il fallait aérer le récit grâce à cette passion amoureuse, que l’on suit avec émotion jusqu’au bout. L’exemple le plus touchant en est cet échange de regard plein de tendresse, entre John et Louise, au beau milieu d’une manifestation qui dégénere.
On a reproché à Beatty de frôler l’académisme, en signant un film trop long et au montage un peu brouillon, c’est quelque peu injuste, car il met tout son talent au service d’un sujet noble: la beauté des intentions d’un Américain idéaliste et dont la naïveté demeure émouvante. Quoi de plus beau que de se battre pour ce que l’on croit, coûte que coûte? L’oeuvre récolta neuf nominations aux Oscars, mais seules deux furent transformées en prix! Un pour la meilleure photographie, attribué à Vittorio Storaro, qui a effectué un travail admirable et un pour la meilleure réalisation que Warren Beatty méritait grandement. Il faut revoir Reds séance tenante.
ANNEE DE PRODUCTION 1981.