Benjamin Barker, connu sous le nom de Sweeney Todd, parvient à s’échapper après 15 ans de prison et se retrouve à Londres à la fin du XIXè siècle. Il n’a qu’un seul dessein: se venger du juge Turpin, l’ayant condamné pour un crime qu’il n’a pas commis, détruisant sa famille du même coup. Il devient barbier au dessus d’une boutique de tourtes, tenue par Mrs Lovett, qui va bientôt l’aider à réaliser son plan diabolique…
Sweeney Todd est l’adaptation d’un musical composé par Stephen Sondheim, lui même issu d’une légende autour d’un barbier serial killer qui égorgeait ses victimes et les donnait à manger, sous forme de tourtes. Bien sûr, il s’agit d’une opérette noire, voire carrément macabre, se déroulant dans le Londres de Jack L’Eventreur, un sujet tout à fait idéal pour Tim Burton qui n’affectionne rien tant que les atmosphères gothiques et effrayantes. Le film reste extrêmement fidèle à l’oeuvre originale, affichant sa radicalité dès le générique d’ouverture (un système d’engrenages que des flots de sang envahit peu à peu), sur des images monochromes devenant progressivement rouges vif. Burton signe là son film le plus gore, un gore « adouci » par les chansons fredonnées par les personnages, tous aussi crapuleux les uns que les autres. On y traite de cannibalisme, de meurtres de masse, le tout avec un malsain assumé. Le récit souffre toutefois de redites, certaines séquences d’égorgement devenant répétitives et complaisantes. Mais n’enlevons pas à Burton le mérite d’avoir soigné ses décors (très beaux), ses costumes d’époque magnifiques et un humour grinçant bienvenu. Grâce à une outrance générale, l’auteur de Mars Attacks désamorce l’horreur et entraine même son propos vers la tragédie shakespearienne dans un final que l’on ne dévoilera pas ici.
En haut du casting, l’acteur fétiche de Burton, Johnny Depp, s’est fait une tête de cadavre livide (rappelant bien sûr son rôle emblématique d’Edward aux mains d’argent) et inquiète en barbier tueur particulièrement impitoyable et sombre. Sa partenaire, Helena Bonham Carter, complice de sa tuerie sans vergogne, apporte sa touche de dinguerie. En juge concupiscent et quasi pédophile hideux, Alan Rickman fait merveille, d’autant que son apparence extérieure l’assimile davantage à un dandy raffiné. Si Sweeney Todd démarre sur un mode comique, il n’hésite pas assez rapidement à revendiquer un nihilisme terrifiant, rarement vu auparavant chez Burton. Peut être son dernier opus le plus personnel et le plus abouti, avant qu’il ne cède aux recettes toutes faites qu’Hollywood semble lui imposer désormais!?
ANNEE DE PRODUCTION 2008.