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VANESSA PARADIS

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Les fées et les anges réunis étaient certainement penchés au dessus du berceau de celle qui allait devenir une des stars les plus fascinantes de notre paysage culturel. Vanessa Paradis vit le jour le 22 Décembre 1972, à Saint Maur des Fossés, dans le Val de Marne, dans une famille aisée, aimante et où l’Art avait une place prépondérante. Son père, André, est sculpteur et son oncle, Didier Pain, comédien de seconds rôles au cinéma. C’est d’ailleurs ce dernier qui va pousser sa jeune nièce à participer à l’émission « L’école des Fans », lorsque le chanteur Philippe Chatel est invité. La gamine d’à peine 8 ans entonne le titre « Emilie Jolie » d’une petite voix adorablement juste. Sait elle déjà qu’elle sera bientôt propulsée au firmament du vedettariat grâce à une chanson sortie au cours de l’été 1987 et qui allait devenir le tube Joe le Taxi ? Vanessa n’a que 14 ans quand elle explose avec ce titre, devenant très vite numéro 1 du Top 50 de nombreuses semaines, détrônant même une de ses idoles de jeunesse, Madonna. Sous l’égide du parolier Etienne Roda Gil, tout de suite séduit par ce petit brin de jeune fille à la jolie frimousse, elle fait preuve d’une réelle présence, même si sa voix fluette inspire autant d’admiration que de jalousies et de haines. Il semblerait qu’en France, le succès si vite acquis déplaise à une partie du public, et Vanessa va apprendre à ses dépens les aléas souvent cruels de son triomphe prématuré. Alors qu’elle se produit sur la scène du Midem en 1988, elle est sifflée, chahutée et moquée de toute part, mais contre mauvaise fortune bon coeur, elle n’en laisse rien paraître et continue sa chanson jusqu’au bout. La tête pleine de rêves d’artistes, elle s’ennuie quelque peu à l’école, où la discipline et la routine du quotidien ne provoquent en elle que lassitude et elle se battra bec et ongles pour mener sa carrière naissante, aidé par son oncle, devenu entre temps son manager.

    

Son premier album connait un beau succès avec des titres comme Marilyn et John, Maxou, ou Coupe Coupe et Vanessa se transforme peu à peu en Lolita sexy, affichant une moue à la Bardot et un corps idéalement sculpté. L’adolescente a trouvé l’amour avec le chanteur Florent Pagny et sa timidité a laissé place à une assurance, renforcée par deux rencontres essentielles. La première va littéralement changer l’image de la jeune fille et lui apporter le crédit que beaucoup ne lui accordent pas encore. Le réalisateur Jean Claude Brisseau la choisit pour être Mathilde, une lycéenne en marge du système et nouant une liaison secrète avec son professeur. Noce Blanche sort à la fin 1989 et remporte une énorme adhésion, critique et public, saluant le talent étonnant de Vanessa. Il faut dire que sa prestation, entre force et extrême sensibilité, bluffe littéralement ceux qui la prenaient pour une étoile filante sans consistance. Elle donne la réplique à Bruno Cremer dans ce rôle douloureux, révélant sa nature innée d’actrice. Sa photogénie incroyable, son visage à la fois mutin et « femme fatale » capte la lumière et qu’importe que le tournage soit éprouvant, Brisseau la pousse dans ses retranchements et la caméra saisit ce miracle. Résultat: deux millions et demie d’entrées couronnent cette histoire d’amour tragique. Vanessa remporte dans la foulée le César du Meilleur Espoir féminin, quelques temps après une première victoire de la Musique. Le second événement est sa collaboration avec Serge Gainsbourg, il devait lui écrire une seule chanson et finalement, si inspiré par la demoiselle, il lui compose un album entier Variations sur le même t’aime, sorti en 1990, comprenant plusieurs tubes et même une reprise de Lou Reed Walk on the Wild Side. Dès lors, toute la profession prend au sérieux ce petit bout de femme volontaire, devenue star à sa majorité à peine et très vite surmédiatisée. Elle possède assez de classe et de style pour la marque Chanel et tourne une publicité mémorable de Jean Paul Goude, où elle est un petit oiseau perché sur un balancier dans une cage, tel un Titi absolument craquant. La Miss sait s’entourer des meilleurs, peaufine son image et cultive son aura grâce aux shootings photos, faisant la couverture des grands magazines hexagonaux. En 1992, afin de quitter l’hystérie médiatique dont elle est l’objet, elle part s’installer aux Etats Unis. Son histoire d’amour avec Pagny enterrée, elle tombe sous le charme de Lenny Kravitz, le rockeur en vogue du moment, et évidemment ce dernier craque aussi pour elle et lui écrit son troisième album, qu’elle interprète tout en anglais cette fois.

En 1993, le retour au pays lui réserve un accueil des plus chaleureux, d’autant qu’elle entame sa toute première tournée live, montrant un talent réel pour la scène, une communion inouïe avec son public, et cette série de concerts la consacre définitivement comme une artiste majeure. Vanessa se sent très à l’aise avec ses fans, le temps des coups durs et des méchancetés gratuites est passé et désormais, elle peut tout oser, tout tenter, elle n’est plus le feu de paille que les médisants voyaient en elle. Le cinéma la rappelle enfin cinq ans après son coup d’essai magistral et elle tourne Elisa, un drame intense de Jean Becker. L’intrigue se rapproche un peu de l’Eté Meurtrier, une fille perdue à la recherche de son père qu’elle rend responsable du suicide de sa mère. Vanessa est de tous les plans et crève l’écran, avec son énergie communicative, son rythme pour des dialogues tantôt drôles tantôt sombres, et elle joue face à l’ogre Depardieu, quasiment plus impressionné qu’elle par ce duo insolite. Nouveau carton au box office. Sa double activité de chanteuse et d’actrice décuple sa popularité, lui permettant ainsi de monter sur le podium du Palais des Festivals à Cannes, en 1995, pour une soirée très particulière. En effet, elle doit rendre hommage à l’immense Jeanne Moreau, en chantant pour elle la fameuse chanson Le Tourbillon de la Vie. L’alchimie entre les deux femmes est si parfaite que l’émotion ressentie ce soir là déclenche une salve d’applaudissements nourris. Peu après, elles sont réunies à l’affiche d’une comédie fantastique Un Amour de Sorcière, qu’il vaut mieux oublier tant elle était catastrophique et ratée. Heureusement, la Belle croise la route de Patrice Leconte qui lui offre l’opportunité d’être l’élément séducteur pour les retrouvailles entre Delon et Belmondo. Une chance sur deux atteindra péniblement le million d’entrée et cette réunion de talents n’obtiendra pas le triomphe espéré. Leconte enchaine directement avec La Fille sur le Pont, où cette fois Vanessa incarne une fille suicidaire prise sous l’aile d’un lanceur de couteaux, composé par Daniel Auteuil. Sur un noir et blanc remarquable, ce conte romantique charme et envoute dès son prologue. Vanessa ouvre le film sur un monologue de sept minutes, où là encore sa photogénie et son naturel confondant font des merveilles. Au cours de ce tournage, sa vie sentimentale connait un bouleversement total, appelé… Johnny Depp!

Vanessa a rencontré l’acteur américain à l’Hôtel Costes, ou plutôt la légende raconte que c’est lui qui est tombée d’emblée amoureux d’elle, rien qu’en voyant son dos! En tout cas, leur coup de foudre mutuel alimente les gazettes people à n’en plus finir. Désormais, sa vie se déroule entre les US et la France, elle choisit de se faire plus discrète et marque une pause artistique. Elle devient ensuite maman de Lily Rose en 1999, puis de Jack en 2002. Le couple glamour a aussi un projet cinématographique commun, sous la houlette de Terry Gilliam, les annonçant au générique de Don Quichotte, face à Jean Rochefort. Hélas, le tournage débute en 2001 sous les hospices les plus désastreuses et entre les problèmes de production, la santé des acteurs, la météo dévastant les décors, le film n’arrive pas à son terme et reste maudit pour longtemps. Niveau musique, Vanessa fait un come back très attendu avec Bliss, son 4e album, dévoilant des textes très personnels sur sa nouvelle vie de femme amoureuse. Ensuite, elle rentre dans la trentaine, savourant son bonheur conjugal, beaucoup plus rare sur le devant de la scène, sachant aussi pertinemment qu’elle n’a pas besoin de surenchère pour exister. Elle a obtenu son statut d’icône et son absence relative jusqu’en 2005 ne lui fait aucun tort. De retour au cinéma dans un film moyen, Mon Ange, elle prépare une grande tournée dans la France entière,  afin de soutenir l’album qu’elle a coécrit avec M, intitulé Divinidylle, revenant à de la pure pop, entourée de pointures et de musiciens chevronnés. On ne compte plus les tubes issus de cette collaboration: Les piles, L’incendie, Dès que j’t vois. Sa vitalité et son charisme remportent largement la partie et lui permet de renouer avec son public, comprenant l’importance du live et des frissons qu’il lui procure. Du coup, elle met le cinéma entre parenthèses, refusant plusieurs projets, jusqu’en 2009.

Cette année là, elle fait partie de la belle aventure de L‘Arnacoeur , un premier long métrage signé Pascal Chaumeil, au départ une simple comédie romantique, où elle forme un duo savoureux avec Romain Duris. Au final, un carton plébiscité au box office (3,7 millions d’entrées) et amplement mérité, vu la fraicheur et la bonne humeur du film. Son côté solaire, lumineuse de l’intérieur et son sourire ravageur, allié à une personnalité attachante expliquent en partie l’amour qu’elle suscite. Intraitable avec une certaine presse, mais généreuse et disponible pour ses proches et sa famille, elle a su mener une activité dévorante, sans sacrifier l’éducation de ses enfants. En 2012, sa séparation avec Depp fait couler beaucoup d’encre, après quatorze ans de vie commune, elle ronge son frein, consciente que son bonheur n’a pas été vain et fonce vers de nouveaux horizons. Alors qu’elle fête ses 40 ans, elle met les bouchées doubles et tourne plusieurs films d’affilée. De Café de Flore où elle est une magnifique mère d’un enfant trisomique à Cornouaille un drame réalisé par Anne le Ny, où elle fait un voyage vers son passé tourmenté, Vanessa ne choisit pas la facilité et même si en termes de scénarios, la qualité n’est pas toujours au rendez vous, son jeu instinctif demeure irréprochable, sa présence incontestable. Elle est adorable aussi dans Je me suis fait tout petit, une comédie sans prétentions de Cécilia Rouaud qui la filme au plus près, rendant palpable son humanité. En 2013, nouant une liaison avec l’auteur compositeur Benjamin Biolay, elle travaille également à ses côtés à l’élaboration de son sixième disque, Love Songs. Sûrement son plus beau. Des mélodies sucrées, émouvantes ou nostalgiques parcourent un CD en état de grâce. Les pépites à retenir s’appellent Station 4 Septembre, Le Rempart, Les espaces et les sentiments ou la déchirante Chanson des Vieux Cons. La star a ensuite la chance de tourner dans un film américain de l’acteur John Turturro, Apprenti Gigolo, dans lequel elle campe une veuve hassidique très touchante, croisant même la route de Woody Allen à l’occasion de deux séquences communes.

Elle participe à la comédie chorale d’Audrey Dana sur les femmes et leurs névroses Sous les jupes des Filles , sortie en 2014 et bien accueillie, se fondant dans un casting prestigieux comprenant entre autres Isabelle Adjani, Sylvie Testud ou Laetitia Casta. A nouveau une période de flottement, puis les journaux annoncent sa séparation d’avec Biolay. Sa vie amoureuse fait toujours autant les gorges chaudes qu’à ses débuts, sa célébrité excitant d’autant plus la curiosité du quidam moyen. Une boulimie de cinéma semble l’habiter dès 2016, elle est présente au générique de différents films aux univers variés, où elle n’a souvent qu’une petite participation, mais son apport ajoute une plu value inestimable. Dans Maryline, le deuxième long métrage de Guillaume Gallienne après Guillaume et les garçons à table!, elle incarne une actrice installée et magnétique guidant les pas d’une jeune comédienne douée mais hésitante. Dans Chien, le conte cruel de Samuel Benchetrit, elle tient le rôle de l’épouse de l’anti héros et parvient à marquer les esprits en dix minutes à peine. Justement grâce à cette rencontre, Vanessa renoue avec l’amour et son couple avec l’auteur d’Asphalte fonctionne si idéalement qu’ils se marient en Juin 2018. Devenant sa nouvelle muse après Marie Trintignant et Anna Mouglalis, Vanessa est subjuguée par l’écriture de Samuel, son univers décalé, son regard aigu sur la société et son penchant pour les émotions brutes. Il lui compose quelques titres de son 7ème et dernier album en date Les Sources. Les ventes ne seront pas aussi astronomiques qu’autrefois, mais Vanessa y témoigne d’une maturité et d’une douceur impressionnantes. La même année, elle cumule encore deux films aux antipodes l’un de l’autre, et cette fois en tête d’affiche. D’abord dans Un couteau dans le coeur , une oeuvre de genre de Yann Gonzalez dans lequel Vanessa joue un contre emploi total: une productrice de porno gay, lesbienne et dévastée par un chagrin d’amour dans le Paris interlope des années 70. Perruque raide blonde, traits tirés, la mine fatiguée, sa performance est époustouflante. Hélas, l’aspect underground n’a pas attiré les foules. Puis, quelques mois après, elle est sur Photo de Famille, une comédie attendrissante de Cécilia Rouaud avec Jean Pierre Bacri et Camille Cottin comme partenaires. Un joli film sans transcendance, mais où elle irradie encore et toujours.

Sa fragilité apparente cache au fond une grande force de caractère, une lionne battante et bosseuse, toujours soucieuse de donner le meilleur d’elle même. L’envie de se dépasser et d’escalader des montagnes expliquent certainement son désir de se frotter au vertige du théâtre, à cette mise à nu encore inédite pour elle et que son cher Samuel réveille en lui concoctant une pièce intitulée Maman, spécialement inventée à son intention. Depuis ce récent mois de Septembre 2021, elle a investi les planches du théâtre Edouard VII, et chaque soir, elle livre son être profond à ce texte superbe, où elle joue une femme blessée, passant par des registres allant de la légèreté à la gravité la plus poignante. Alors qu’elle gagne cet ultime pari (et gageons qu’elle remontera à l’avenir sur d’autres scènes), elle fait aussi partie du nouveau film de son mari, au titre magnifique Cette Musique ne joue pour personne. Surprenant une nouvelle fois tout le monde dans une partition hilarante de femme bègue rêvant de jouer Simone de Beauvoir dans une comédie musicale! La certitude quant aux prochaines années de sa carrière, c’est qu’elle n’en finira pas de nous étonner, nous éblouir par son intensité, comme elle le fait depuis 35 ans déjà! Vanessa fait partie de nos vies, se réinventant sans cesse, ne perdant jamais l’envie d’avoir envie. Tout récemment, Samuel Benchetrit a déclaré qu’elle avait sans nul doute un accès direct vers les étoiles. Comme ces dernières, elle brille de milles feux, comme hors de l’atteinte du temps. Une déesse vivante et vibrante.

 

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