Au début des années 2000, dans la banlieue de Madrid, Nevenka Fernandez est embauchée en tant que conseillère financière dans une mairie tenue par Ismaël Alvarez, un homme charismatique et influent. C’est le début d’une descente aux enfers pour Nevenka, manipulée et harcelée pendant des mois par le maire. Pour s’en sortir, elle décide de dénoncer ses agissements et lui intente un procès.
La réalisatrice Iciar Bollain, connue pour deux excellents films Ne Dis Rien et Les Repentis, se penche sur des faits de société toujours forts et qui questionnent la conscience collective. Son nouvel opus relate la véritable histoire de Nevenka Fernandez, une jeune femme victime de harcèlement sexuel et résolue après un long temps de sidération à porter les faits devant la justice. Nous sommes dans l’Espagne du nouveau millénaire et à ce moment là, le mouvement MeToo n’a pas encore embrasé la sphère médiatique. Son courage et son combat n’en paraissent que plus exemplaires. Iciar Bollain autopsie les mécanismes d’emprise psychologique du mâle dominant, l’impunité dans laquelle il peut sévir en toute « normalité », et décrypte le parcours mental de sa victime malgré les obstacles dressés contre elle. Le récit évite les pièges du « film à thèse » et rend surtout compte du processus insidieux se mettant en place avec une dénonciation en règle contre un système qui protège les abuseurs. L’Affaire Nevenka s’avère un vibrant plaidoyer pour la cause des femmes réduites au silence et la mise en scène, glaçante, s’accorde bien aux circonstances épouvantables vécues par Nevenka Fernandez.
Pour la première fois en France, on peut découvrir le visage de l’actrice principale Mireia Oriol dont c’est le quatrième long métrage (les précédents sont inédits chez nous). Elle traduit parfaitement le glissement progressif de la perte de contrôle, le basculement vers la dépendance psychologique à son bourreau, avant le sursaut vers le rébellion. Son partenaire, Urko Olazabal, est saisissant de justesse dans le rôle de l’odieux maire toxique. Jamais didactique (alors que documenté), le film s’affaiblit légèrement dans son ultime quart d’heure, sûrement un peu expédié, mais en globalité il secoue surtout par son caractère nécessaire, cette aptitude de la fiction à ouvrir les yeux sur des réalités trop longtemps enfouies sous le tapis des non dits et de la peur du scandale.
ANNEE DE PRODUCTION 2024