Martha Beck n’est qu’une inoffensive infirmière, obèse et célibataire. Du moins jusqu’au jour où elle répond à l’annonce matrimoniale d’un certain Raymond Fernandez, gigolo et arnaqueur aux mariages. Désormais inséparables, ils vivent une passion subversive, écument les Etats Unis, se font passer pour frère et soeur et piègent des veuves et des vieilles dames riches pour les voler d’abord. Les assassiner sauvagement ensuite…
Totalement fidèle au fait divers des années 40 relatant la rencontre et l’odyssée meurtrière des amants diaboliques, Martha Beck et Ray Fernandez, Les Tueurs de la Lune de Miel reste pour toujours l’oeuvre unique d’un homme exerçant le métier de musicien et qui se prit de passion pour cette histoire. Il passa derrière la caméra pour ce « coup d’essai », puisqu’il ne sera suivi d’aucun autre. Leonard Kastle se pencha en détails sur les comptes rendus d’audience, les coupures de presse, les témoignages de l’époque et écrivit un script admirable sur cette association maléfique, ce couple tristement célèbre et auteurs de plusieurs crimes abominables. Ce diamant noir du cinéma américain se veut tout à la fois un policier réaliste et un constat sans appel sur une société en décomposition, où des êtres sans conscience ni remords ont fait le mal par appât du gain et par cruauté. Sa réalisation de débutant n’a rien à envier aux plus grands: noir et blanc glauque, plans séquences soignés, souci de véracité, absence d’éléments hollywoodiens classiques, le tout ressemblant presque à un documentaire. L’image granuleuse accentuant ce sentiment d’assister à des événements filmés sur le vif.
Le cynisme de Raymond, allié à la jalousie maladive de Martha, en plus de leurs pulsions criminelles aboutissent à des meurtres d’une sauvagerie rare, que Kastle a -un peu-édulcoré par rapport à la réalité, bien que certaines séquences soient tout de même d’une violence crue inédite jusque là! Ce qui explique l’ostracisme dont fut victime le film à sa sortie, jugé trop sombre. Le couple maudit est incarné par deux comédiens alors quasi inconnus, Tony Lo Bianco et Shirley Stoler, renforçant l’aspect véridique du propos. Ces rôles terribles leur colleront tant à la peau qu’ils briseront aussi tout net leur carrière. Cette représentation du Mal fait toujours sensation de nos jours grâce à la puissance intacte du film: preuve que certains faits divers se révèlent parfois plus terrifiants encore que les scénarios de cinéma les plus imaginatifs!
ANNEE DE PRODUCTION 1970.
