Baxter, un gros bull terrier, doué de pensées, a suffisamment observé les humains et subi leur médiocrité et leurs névroses pour désirer se débarrasser de leur compagnie encombrante. Au fil des mois, il va « changer » à trois reprises de famille d’accueil…
Qui a dit qu’en France les auteurs n’étaient pas capables de pondre des histoires atypiques et sortant de l’ordinaire? Ce Baxter en est l’éclatante preuve du contraire! Adapté d’une série Noire américaine intitulé Des Tueurs pas comme les autres de Ken Greenhall, il s’agit du tout premier long métrage d’un certain Jérôme Boivin, et scénarisé par le futur grand Jacques Audiard (rien de moins!). Il faut déjà être bien gonflé pour donner le rôle principal à un clébard, d’autant que celui ci est doté de pensées et nous les dispensent en voix off, décrivant toute son aversion pour le genre humain. Les bassesses, les minables comportements, les bizarreries des hommes sont ainsi jugées sur pièce par ce chien également capable de produire des « accidents » malheureux quand il en a plus qu’assez de ses maîtres! Cette tentative de fantastique à la française, plutôt couronnée de réussite, bénéficie d’une écriture cynique, radicale et intelligente sur le pauvre monde tragique dans lequel les hommes « évoluent », se comportant souvent pire que des animaux! Filmé en caméra subjective afin de mieux adopter le point de vue de ce toutou pas comme les autres, Baxter interroge clairement: qui sont les plus inquiétants? Ces humains ou ce chien doté de jugements finalement assez lucides? Passant d’abord entre les mains d’une vieille bique solitaire sombrant dans la folie, puis d’un couple affectueux qui le délaisse soudain quand ils mettent au monde un bébé, et enfin atterrissant chez un ado fasciné par Hitler et le IIIe Reich, possiblement futur néonazi!
Aucune tête d’affiche renforce l’aspect cru et « véridique » du film, si ce n’est Jean Paul Roussillon dans un petit rôle et la comédienne de théâtre Lise Delamare. Un petit ventre mou en cours de métrage empêche peut être de crier complètement au génie, mais cette oeuvre très particulière brille quand même par une originalité frappante et dispense un regard malsain (et néanmoins réaliste) sur notre « humanité ». La rage contenue dans les monologues du cabot annoncent le nihilisme du cinéma de Gaspard Noé (Seul contre tous). Le chien, meilleur ami de l’homme? Plus si sûr finalement!
ANNEE DE PRODUCTION 1989.